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D’après Reporterre du 04 Avril 2022

Les solutions du GIEC face au chaos climatique

Par Bruno Bourgeon

jeudi 5 mai 2022, par JMT

Les solutions du GIEC face au chaos climatique

Eoliennes au Danemark (Wikimedia Commons/CC BY-SA 3.0/Fanny Schertzer)

Dans un nouveau rapport, le GIEC dresse un sombre état des lieux de nos efforts pour atténuer nos émissions de gaz à effet de serre. Il dévoile toutefois un itinéraire clair pour y parvenir, avec les renouvelables et la réduction de la demande énergétique.

Le temps presse. Après deux semaines de discussions, les représentants des 195 États ont approuvé le 4 avril 2022 le « résumé pour décideurs » du troisième volet du sixième rapport du GIEC. Sur une soixantaine de pages — soit deux fois plus que dans sa précédente édition —, le document détaille les options pour réduire au plus vite nos émissions de gaz à effet de serre.

Premier constat : la tendance actuelle n’est toujours pas la bonne et mène à une augmentation de la température de 3,2 à 5°C à l’horizon 2100. Durant la décennie 2010-2019, les émissions de gaz à effet de serre ont atteint un nouveau record (56 Gt CO2eq par an en moyenne), « le plus haut niveau de toute l’histoire de l’humanité ».

Maigre consolation : la croissance de nos émissions a ralenti (+1,3% par an) par rapport à la décennie précédente (+2,1% par an). Pourtant, sans des réductions immédiates et profondes des émissions dans tous les secteurs, limiter le réchauffement climatique à 1,5°C sera impossible.

Et le calendrier est clair. Que l’objectif soit de limiter le réchauffement climatique à 1,5 ou 2°C, il faudra atteindre le pic des émissions de GES avant 2025. Selon l’objectif retenu (1,5 ou 2°C), il faudra ensuite réduire les émissions de 43% ou de 27% par rapport à 2019 à l’horizon 2030 pour atteindre la neutralité carbone — un équilibre parfait entre les émissions et l’absorption du carbone par différents puits de carbone — en 2050 ou 2070.

Certains points sont des éléments de crispation, comme la sortie des énergies fossiles, le rôle des technologies, les questions d’équité et de finance. Sur la question des énergies fossiles, les experts sont clairs : il faut limiter l’utilisation du pétrole et du gaz.

Conséquences : les actifs financiers liés aux énergies fossiles perdront de leur valeur dans une trajectoire visant les 1,5°C de réchauffement, les infrastructures fossiles existantes devront être éliminées rapidement, et nous devrons renoncer à consommer une part substantielle de ces réserves en énergie fossile.

Concernant les technologies de capture et de séquestration du carbone, le GIEC rappelle que celles-ci ne doivent pas se substituer aux diminutions de l’usage des énergies fossiles. Pour atteindre l’objectif de 1,5°C, la réduction de l’utilisation du charbon devra être de 100% à l’horizon 2050. Celles de pétrole de 60% et de gaz de 70%.

Même en ayant recours à la capture et au stockage du carbone — pour compenser des émissions résiduelles, les objectifs resteront peu ou prou les mêmes pour le charbon (-95%) et le pétrole (-60%). Seules les ambitions de réduction de l’usage du gaz pourront être moindres (-45%).

En matière d’équité enfin, les chiffres sont éloquents : bien que ne représentant qu’un cinquième de la population mondiale (22%) en 2019, l’Amérique du Nord, l’Europe, l’Australie, le Japon et la Nouvelle-Zélande ont contribué historiquement à 43% des émissions de gaz à effet de serre.

À la même date, l’Afrique et l’Asie du Sud comptaient 61% de la population, pour 11% des émissions. La distribution des inégalités s’observe au sein même des États : les 10% des ménages les plus riches contribuent à 34 à 45% des émissions.

Face à ce constat, les États les plus émetteurs n’ont pourtant pas encore respecté leurs engagements : les flux financiers climatiques publics et privés des pays développés vers les pays en développement restent encore en deçà de l’objectif fixé dans le cadre de l’Accord de Paris, et fixé à 100 milliards de dollars d’ici 2020.

Toutefois, les auteurs du rapport se veulent rassurants. Des options existent dans tous les secteurs. Certains se sont même avérés plus prometteurs qu’attendu. C’est le cas de l’éolien, du solaire ou des batteries dont les coûts ont chuté jusqu’à 85% depuis 2010.

En outre, un éventail croissant de politiques et de lois ont amélioré l’efficacité énergétique, réduit les taux de déforestation et accéléré le déploiement des énergies renouvelables. Des « lois climat » ont été mises en place dans 56 pays (ces États représentaient 53% des émissions mondiales en 2020).

Au moins 18 pays ont réussi pendant plus de dix ans à réduire leurs émissions liées à la production et à la consommation. Par ailleurs, les actions en justice pour dénoncer le manque d’action climatique des États ont augmenté.

Mais les efforts doivent persister. Pour y parvenir, d’importants investissements seront nécessaires. Pour l’heure, ceux-ci restent encore largement insuffisants, estiment les auteurs. Les flux financiers destinés à limiter le changement climatique sont encore 3 à 6 fois trop faibles par rapport à ce qui serait nécessaire en 2030 pour limiter le réchauffement à 2°C.

Et le soutien financier aux énergies fossiles est encore bien trop important, a déploré Raphaël Jachnik, spécialiste de la finance à l’OCDE. Pourtant, les capitaux et les liquidités existent et sont suffisants pour combler ce déficit.

Parmi les nouveautés, une place importante a été donnée à l’évolution de la demande, à savoir celle de nos comportements individuels (choix de transport, de régimes alimentaires, de consommation, de réduction du gaspillage, etc). Si ceux-ci pourront avoir un effet substantiel sur l’évolution des émissions, ils nécessitent d’être accompagnés par des politiques publiques adéquates.

Avoir accès au télétravail, disposer de pistes cyclables ou d’un bus à proximité de son travail sont autant de choix collectifs qui touchent les infrastructures et qui pourront accompagner les démarches individuelles.

Enfin, comme en 2014, les experts dressent un inventaire des solutions à mettre en œuvre dans les secteurs les plus émetteurs, notamment pour la production d’énergie — responsable de 34% des émissions de gaz à effet de serre en 2019 —, l’industrie (-24%), l’agriculture, la foresterie et l’utilisation des sols (-22%), ou encore les transports (-15%). « Il existe des options dans tous les secteurs pour réduire les émissions de moitié », précisent les auteurs.

En ce qui concerne la production d’énergie, les auteurs recommandent une réduction drastique de l’usage des énergies fossiles, et une généralisation de l’électrification en améliorant l’efficacité énergétique et l’usage des alternatives aux combustibles fossiles. Les espaces urbains pourront être source d’économies, en misant sur des villes compactes adaptées aux mobilités douces, combinées aux transports électriques, tout en favorisant l’insertion de puits à carbone naturels.

Dans le secteur industriel, les auteurs préconisent l’économie circulaire incluant des matériaux recyclés, réutilisés, et en minimisant les déchets. Enfin, le secteur de l’agriculture, de la foresterie et de l’usage des sols devront à la fois permettre de réduire les émissions, mais également capter du carbone, et permettront d’assurer des moyens de subsistance, notamment alimentaires.

Ce troisième volet clôt le sixième rapport du GIEC, dont une synthèse sera présentée en septembre 2022. Les différents groupes de travail ont tous exhorté les décideurs politiques à une action rapide pour réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre. L’étau semble toujours davantage se resserrer.

À l’été 2021, le premier volet consacré aux connaissances physiques du changement climatique a alerté sur l’accélération du changement climatique, rappelant qu’« il nous reste vingt ans pour éviter le pire ».

Fin février 2022, le deuxième volet est consacré aux possibilités d’adaptation face au changement climatique, les experts ont confirmé que les événements extrêmes seront de plus en plus fréquents et que tout retard supplémentaire dans l’action mondiale manquera une brève occasion de garantir un avenir vivable et durable pour tous. Une conclusion partagée par les auteurs de ce troisième volet.

Bruno Bourgeon http://www.aid97400.re

D’après Reporterre du 04 Avril 2022

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