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D’après Alternatives Economiques du 08 avril 2022

Revitaliser la démocratie

Par Bruno Bourgeon

mardi 10 mai 2022, par JMT

Revitaliser la démocratie

Manifestation des Gilets jaunes en faveur du RIC, à Bordeaux, le 9 février 2019 (PHOTO Sebastien ORTOLA/REA)

Face à un système démocratique à bout de souffle, des initiatives citoyennes s’efforcent de favoriser la participation et la délibération collective. Mais des blocages institutionnels perdurent.

La proposition de Loi était passée assez inaperçue en 2020.... Deux ans plus tard, avant l’échéance du dépôt des parrainages pour l’élection présidentielle, en mars, le groupe parlementaire LFI l’a remis sur la table : instaurer un système de parrainages citoyens.

L’objectif ? Remplacer l’actuel système par un dispositif de parrainage de 150000 citoyens issus d’une trentaine de départements. Une manière de s’engouffrer dans le sillage des tentatives de revitalisation d’une démocratie représentative que d’aucuns considèrent comme moribonde ?

Depuis quelques années, des citoyens de divers horizons tentent de faire avancer la question du renouveau démocratique. Avec plus ou moins de succès... L’un des derniers exemples en date : la mobilisation, à l’été 2021, du collectif de soignants « Notre hôpital, c’est vous » en faveur de l’amélioration de l’offre de soins en France.

Estimant que l’expérience de la pandémie de Covid-19 avait permis à la population de prendre conscience de l’urgence de renforcer les moyens de l’hôpital public, ces soignants ont souhaité passer par le Référendum d’initiative partagée (RIP) afin de rénover le système hospitalier.

Prévu par une réforme constitutionnelle de 2008, à la suite de préconisations de plusieurs travaux sur la rénovation des institutions de la Cinquième République, le RIP permet à des citoyens de rédiger un texte de loi, qui doit être parrainé par 185 parlementaires au minimum, alors autorisés à saisir le Conseil constitutionnel. Si ce texte est validé par les Sages, il peut ensuite être proposé à la signature des citoyens : s’il est paraphé par un dixième du corps électoral en l’espace de neuf mois, le Parlement se saisit alors de cette proposition de loi.

A défaut, le texte peut être soumis directement à référendum... Dans le cas du texte proposé l’an dernier par le collectif de soignants, le processus du RIP n’est pas allé au bout, la proposition de loi portée par les soignants n’ayant pas été validée par le Conseil Constitutionnel. Pourtant, la demande de participation citoyenne est forte. Le problème est que le Parlement ne joue plus son rôle. La représentativité du personnel politique est de plus en plus faible, par la forte abstention électorale.

Ces questions sont peu abordées dans la campagne présidentielle. Le renouveau démocratique est pourtant mère de toutes les batailles. Il est même absolument nécessaire pour répondre aux enjeux de notre temps, les questions sociale, écologique et démocratique étant extrêmement imbriquées.

Et que penser des mobilisations citoyennes qui ont éclos ces derniers temps, en dehors des cadres de la traditionnelle démocratie représentative, « Sans minorer l’intérêt et l’ampleur de ces mobilisations, que ce soit Nuit debout, les Gilets jaunes, la Primaire populaire ou d’autres, ce sont bien souvent des échecs », analyse le chercheur Rémi Lefebvre ?

Soit car il y a refus des logiques représentatives existantes, telle l’élection, soit parce que ces démarches se heurtent à la résistance des partis politiques. Les formations politiques traditionnelles ne sont pas prêtes à faire face à la participation citoyenne, qu’elles perçoivent comme un contre-pouvoir. Le vieux monde qui résiste.

L’association « Démocratie ouverte » est née en France il y a une dizaine d’années, inspirée du « Partenariat pour un gouvernement ouvert » (Open Government Partnership – OGP), une initiative internationale encourageant les États à ouvrir leurs modes de gouvernance, en associant davantage les citoyens aux décisions publiques. Emmanuel Macron, a promis un « grand débat permanent » s’il est réélu.

Ces dispositifs de participation citoyenne existants ne vont pas assez loin pour insuffler un renouveau démocratique en France : ils restent consultatifs. Parfois même, la promesse initiale est trahie, à l’image de la Convention citoyenne pour le Climat. La montagne a accouché d’une souris, avec une loi Climat ne répondant pas aux enjeux mis en avant par les membres de la Convention. Le lien à la décision finale ne se fait donc pas.

Pour tenter de faire avancer les choses, le CLIC (Citoyen.ne.s lobbyistes d’intérêt commun) propose notamment de former des collectifs de particuliers au « lobbying citoyen ». Relations avec les élus, possibilités de mobilisation pour faire avancer une cause sociale ou écologique…

L’idée forte est qu’une Constitution ne suffit pas à fonder une culture démocratique : il faut la faire vivre, et ce, bien au-delà du vote. D’où la nécessité de réformer notre système. Et d’esquisser quelques pistes : assemblées citoyennes locales pour nourrir les décisions politiques ; droit d’amendement citoyen avec désignation d’un « rapporteur citoyen » au Parlement ; remplacement de l’actuel Sénat par une chambre citoyenne de 500 membres tirés au sort...

La solution pourrait résider dans l’instauration d’un référendum d’initiative citoyenne (RIC) constituant. On observe la difficulté de mettre en œuvre l’initiative citoyenne en France, par contraste avec la Suisse par exemple, où l’opinion des citoyens compte davantage. En permettant à un minimum de 700000 citoyens de soumettre une proposition de révision constitutionnelle, le RIC constituant serait une possibilité nouvelle pour le peuple d’influencer la loi constituante.

Le RIC constituant paraît répondre à nombre d’enjeux : la coupure de plus en plus nette entre la classe politique et la population, la concentration croissante des pouvoirs aux mains de l’exécutif – qui est à mon sens une dérive institutionnelle conduisant à un affaiblissement démocratique… Le RIC constituant pourrait renverser ces tendances, en faisant en sorte que le processus de décision soit ascendant, c’est-à-dire des citoyens vers l’exécutif et non l’inverse.

Les membres de Démocratie ouverte et leurs soutiens pointent 6 mesures à prendre d’urgente pour rénover le système démocratique : former la jeunesse aux pratiques démocratiques ; lutter contre l’abstention par la reconnaissance du vote blanc ; garantir l’indépendance des médias ; limiter l’influence des lobbyistes dans la sphère politique ; apporter un soutien financier structurel aux innovations citoyennes et démocratiques...

Et enfin organiser une Convention citoyenne pour la démocratie, ayant pour mandat de repenser les règles du jeu politique, la place des citoyens dans l’élaboration des décisions publiques, dont les conclusions seraient soumises à référendum.

Une panoplie de réponses existe donc déjà pour insuffler davantage de délibération collective dans notre démocratie. Des propositions à mettre en œuvre avec ou sans le concours des partis politiques traditionnels ? La mort des partis ne paraît ni souhaitable ni réaliste, mais il y a incontestablement une nécessité de rénover l’offre politique.

Bruno Bourgeon http://www.aid97400.re

D’après Alternatives Economiques du 08 avril 2022

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