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D’après Alternatives Economiques du 07 Avril 2022

En route pour un monde invivable

Par Bruno Bourgeon

mardi 10 mai 2022, par JMT

En route pour un monde invivable

Le lac de Nalsarovar asséché, dans l’Etat du Gujarat (Inde) le 4 juin 2019 (SAM PANTHAKY / AFP)

Faisons le point sur les perspectives pour le climat élaborées par le GIEC dans son dernier rapport, la pratique des « passeports dorés » en Europe, le lien entre retraite et santé, les effets du seuil de 50 salariés pour les entreprises et l’évolution des expulsions locatives pendant la crise sanitaire.

Le GIEC a publié le 4 avril le troisième et dernier volet (le sixième du genre depuis 1990), consacré aux politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La somme des engagements actuellement pris par les Etats représente, dans le meilleur des cas, une baisse d’environ 10 Gt (gigatonnes = milliards de tonnes) de CO2 et autres gaz à effet de serre (mesurés en équivalent CO2) à l’horizon 2030, par rapport au niveau record de 59 Gt mesuré en 2019.

De quoi limiter le réchauffement à 2,5°C, en aucun cas tendre vers l’objectif de 1,5°C, pour lequel l’ambition devrait être trois fois plus forte. La différence entre un monde très brutal et une planète qui resterait encore relativement semblable à celle que nous connaissons aujourd’hui. Les engagements ne pèsent pas lourd.

Après la Covid, les émissions mondiales sont reparties en flèche à la hausse. Pour l’instant, nous nous dirigeons vers un monde à plus de 3°C (2°C de plus que le niveau de réchauffement actuel). Un choix suicidaire alors que des alternatives sont possibles. Une véritable ambition climatique devrait reconsidérer le partage de la richesse et une réorientation de la consommation.

Bruxelles continue sa traque du patrimoine des oligarques russes. Sauf que les « passeports et visas dorés » accordés par certains Etats-membres en échange d’investissements limitent sa force de frappe. Les « visas dorés » permettent aux citoyens étrangers à l’UE (fortunés) de gagner un permis de résidence en échange d’un investissement supérieur à un certain seuil : de 60000 euros en Lettonie à 1250000 euros aux Pays-Bas. Dans l’Union, 13 pays utilisent ce dispositif et délivrent en moyenne 5000 permis par an dont les plus gros contingents se trouvent en Espagne, au Portugal ou en Grèce.

Les bénéficiaires sont en majorité des Chinois (pour 55%) et des Russes (20%). Cela irrite la Commission. Fin mars, elle a invité ces pays à suspendre la délivrance de ces visas dorés aux ressortissants russes et biélorusses faisant l’objet de sanctions, et à retirer ou refuser le renouvellement des existants. Un titre de séjour en cours de validité accorde à un ressortissant d’un pays non membre de l’UE non seulement le droit de séjourner dans l’État membre concerné, mais aussi celui de circuler librement dans l’espace Schengen.

Mais certains pays vont plus loin, en accordant non un permis de résidence contre investissement, mais la nationalité. C’est le cas de Malte, qui est le dernier à proposer des passeports dorés. En 2019, 1000 passeports dorés avaient été octroyés par les deux pays, en majorité à des Russes. Malte a suspendu le programme pour les citoyens russes et biélorusses suite à la guerre en Ukraine, mais la Commission a lancé, le 6 avril,une procédure d’infraction contre l’île, afin qu’elle abroge purement et simplement le dispositif. La Valette a désormais deux mois pour répondre à la demande, faute de quoi la Commission pourra saisir la Cour de Justice de l’Union européenne.

Repousser l’âge de la retraite à 65 ans ? Voilà une bien mauvaise idée. Quel est l’impact des conditions de travail passées et de la retraite sur la santé physique et mentale ? La retraite joue un rôle protecteur. C’est vrai pour les personnes dont le travail a été éprouvant sur le plan physique ou psychosocial : c’est intuitif. Les bénéfices sont les plus visibles pour les hommes non diplômés et exposés à de fortes contraintes physiques. La probabilité de se déclarer en mauvaise santé diminue alors de plus de 21% (20% chez les femmes) par rapport aux hommes non diplômés qui ne subissent pas la même exposition aux risques physiques.

Même chose pour la probabilité de déclarer une dépression chez les travailleurs qui ont été exposés à des risques psychosociaux. En réalité, ce rôle protecteur s’observe chez tout le monde. C’est le signe d’un mal-être généralisé au travail chez les seniors. Gardons-nous d’une politique d’augmentation de l’âge de la retraite sans réelle politique de prévention et de santé au travail tout au long de la vie.

Selon les déclarations fiscales, il existe deux fois plus d’entreprises de 49 personnes que de 50. Comment expliquer cette bizarrerie ? Le fait que ce seuil de 50 salariés enclenche un certain nombre d’obligations légales, telles la mise en place d’une instance de dialogue social (Comité social et économique ou CSE) et un accord de participation pour faire profiter les salariés des bons résultats de l’entreprise, n’y est pas étranger. Ce seuil agirait comme un frein à la croissance, certains patrons préférant ne pas faire croître leur effectif plutôt que de subir les multiples contraintes qu’il engendre.

Pour en avoir le cœur net, des économistes ont comparé dans une note les effectifs des entreprises selon les déclarations faites par le dirigeant au fisc et selon les déclarations de données sociales basées elles sur le nombre de salariés pour lesquels une entreprise paie des cotisations. Le pic d’entreprises de 49 salariés disparaît totalement.

Conclusion : on a affaire à une sous-déclaration massive des effectifs pour les entreprises atteignant le seuil de 50 salariés. Plus précisément, la proportion d’entreprises « omettant » de déclarer un salarié connaît un saut statistique pour celles comptant 50 employés, puis « celles sous-déclarant de 2 salariés [enregistre] un saut à 51 salariés, et ainsi de suite », écrivent les auteurs de la note.

La fraude afin d’éviter les obligations liées à ce seuil semble donc avérée. Ce contournement des contraintes permet-il à ces entreprises de connaître une plus brillante destinée ? Même pas. L’hypothèse ne semble pas étayée. Les entreprises qui tentent de rester sous la barre des 50 salariés déclarés semblent donc avoir une croissance réelle comparable aux autres. De plus, en refusant aux salariés la mise en place de CSE ou d’accords de participation, ces entreprises les privent des externalités positives que sont le dialogue social et le partage des profits.

Les consignes aux préfets étaient claires : en 2020 et 2021, en période de crise sanitaire, on n’expulse pas de ménages sans solution de relogement ou d’hébergement pérenne. Des consignes « appliquées de manière imparfaite et inégale selon les territoires », regrette la Fondation Abbé Pierre, qui rappelle qu’en 2020, malgré le report par deux fois de la fin de la trêve hivernale, 8456 expulsions ont été exécutées par la force publique.

Deux fois moins que l’année précédente, mais c’est loin d’être insignifiant. Un impact que révèle l’analyse des appelants en 2021 de la plate-forme « Allo Prévention Expulsion » assurée par la Fondation : dans trois cas sur quatre, l’impossibilité de payer son loyer a été causée par une perte ou un changement d’emploi, ou des raisons de santé. Des difficultés que la procédure d’expulsion vient aggraver.

Bruno Bourgeon http://www.aid97400.re
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