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D’après notre-planete.info du 22 Juin 2022

L’impressionnante fonte de la banquise arctique

Par Bruno Bourgeon

samedi 6 août 2022, par JMT

L’impressionnante fonte de la banquise arctique

Étendue de la banquise arctique le 13 septembre 2013 (maximum annuel). La ligne jaune correspond à la superficie moyenne sur 30 ans}

L’océan arctique (pôle nord) est dominé par la glace de mer qui s’accumule à chaque saison, et qui reste en place des années, même si son épaisseur et son étendue varie en fonction de la saison. Or, les mesures satellitaires de plus en plus précises et montrent que la banquise arctique fond à une vitesse élevée, suivant une tendance lourde. Dans quelques années, elle ne sera plus.

Le principal témoin du réchauffement climatique est sans doute la fonte impressionnante de la banquise arctique. Il s’agit d’une boucle de rétroaction positive : le réchauffement signifie moins de glace et plus de glace va fondre, mais aussi, parce qu’il y a moins de glace, moins de rayonnement solaire incident est réfléchi, ce qui contribue au réchauffement : c’est l’effet albédo.

Chaque année, la couverture de glace de mer recouvrant l’océan Arctique et les mers environnantes s’épaissit et s’étend pendant l’automne et l’hiver, atteignant son maximum annuel entre la fin février et le début avril. Puis, la glace fond en partie au printemps et en été jusqu’à ce qu’elle atteigne son minimum en septembre.

Ainsi, deux mois sont particulièrement significatifs dans l’étude des variations de cette banquise :

- Septembre, à la fin de l’été lorsque la banquise atteint sa superficie minimale.

- Mars à la fin de l’hiver, lorsque la banquise atteint sa superficie maximale.

La superficie de la banquise est mesurée avec précision depuis 1979, date des mesures satellitaires. Elles permettent de dégager une tendance à moyen terme sur l’évolution ou la régression de la banquise arctique. Or, depuis plus de 40 ans, les données enregistrées montrent un déclin structurel impressionnant, sans équivoque et qui témoigne du réchauffement climatique en cours. Les vidéos et données sont particulièrement édifiantes.

Selon les données du GISS de la NASA, depuis les années 1990, l’Arctique se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne planétaire. Ce phénomène appelé amplification de l’Arctique est une réaction régionale amplifiée du réchauffement planétaire.

Selon les analyses et données du National Snow and Ice Data Center (NSIDC ) (Université du Colorado à Boulder) en partenariat avec la NASA, depuis l’an 2000, la situation se détériore nettement : entre les années 1980 et les années 2010, le minimum d’extension moyen est passé d’environ 7 millions de km² (moyenne sur 1979/1990), à environ 4,5 millions de km² (en moyenne sur 2011/2018), en baisse constante sur les dernières décennies.

Si l’on considère l’étendue maximale de la glace de mer (au mois de mars), la situation est comparable : les dernières années confirment que la banquise arctique fond dramatiquement.

La superficie de la banquise arctique diminue chaque année en moyenne de 47 800 km², plus que la taille de la plus grande région de France métropolitaine : Midi-Pyrénées. Ainsi, en seulement 30 ans, l’étendue de la glace de mer arctique a diminué de près de 45 % pour le mois de septembre…

Pire encore : cette situation est sans précédent depuis au moins mille ans, écrivait le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) dans son rapport spécial sur les océans et la cryosphère, paru en septembre 2019.

Outre la superficie, il est intéressant de considérer l’âge de la glace. En effet, une glace plus vieille a tendance à être plus épaisse et donc plus résistante aux aléas qui peuvent l’affecter. Or, selon le NSIDC, en 2019, seulement 1 % de la couverture de glace de mer était constituée de glace datant d’au moins 4 ans, contre 33 % en 1984. Aujourd’hui, deux tiers de la glace qui forme la banquise a moins d’un an. La banquise, plus jeune et plus mince, fond plus rapidement.

L’épaisseur de la glace est également un bon indicateur : historiquement suivie par campagne aérienne, cette information est maintenant disponible grâce au satellite CryoSat-2 , depuis 2011. CryoSat-2 mesure la hauteur de la banquise au-dessus de la ligne de flottaison, ce que l’on appelle le franc-bord, afin d’en déduire son épaisseur totale.

La glace peut atteindre un mètre d’épaisseur chaque hiver, et si elle survit à un ou plusieurs étés, elle peut même atteindre plusieurs mètres. De plus, au grès des courants marins, la glace flottante parcourt de grandes distances et finit par s’accumuler le long du Groenland et des îles canadiennes pour former des couches pouvant atteindre 10 mètres d’épaisseur.

En février 2018, une vaste zone d’eau libre est apparue dans la banquise au nord du Groenland, à l’intérieur de la banquise pluriannuelle - la glace la plus ancienne et la plus épaisse de l’Arctique. Si la majeure partie a ensuite gelé de nouveau, elle s’est fragilisée.

Si le bilan de masse de l’inlandsis groenlandais a été proche de la normale de septembre à décembre 2017, il s’agit d’une exception dans la tendance générale constatée depuis deux décennies, l’inlandsis du Groenland ayant perdu environ 3 600 milliards de tonnes de glace depuis 2002. Autrement dit, plus de 3 900 milliards de litres d’eau ont rejoint les océans, c’est l’équivalent de plus de 40 fois le volume d’eau du lac Léman.

En 1979, pour le mois d’octobre, le volume de glace de mer en arctique était d’environ 17 000 km cube, contre seulement 4 000 km cube en octobre 2020 (6 000 pour le record de 2012), une baisse de 325 % ! Depuis les suivis par satellites de 1979, les étendues maximales dans l’Arctique ont diminué à un rythme d’environ 13 % par décennie, les étendues minimales diminuant d’environ 2,7 % par décennie. L’Arctique se réchauffe environ trois fois plus vite que les autres régions (NASA, 2022) .

A ce rythme, la banquise arctique pourrait avoir complètement disparu (en été) en septembre 2054 selon des estimations effectuées par des scientifiques de l’Université d’État de New York à Albany

Une autre étude publiée en octobre 2021 dans Earth Future s’intéresse à une région d’un million de kilomètres carrés située entre le nord du Groenland et les côtes de l’archipel canadien, où la glace de mer est traditionnellement la plus épaisse et donc probablement la plus résistante tout au long de l’année. Selon les scénarios optimistes et pessimistes (de réchauffement climatique), d’ici 2050, la glace estivale dans cette région s’amincira considérablement.

Dans le scénario optimiste, si les émissions de carbone peuvent être réduites d’ici là, une partie de la glace estivale pourrait persister indéfiniment. Cependant, dans le scénario pessimiste, dans lequel les émissions de gaz à effet de serre continuent sur leur trajectoire actuelle, la glace estivale disparaîtrait d’ici 2100, ainsi que tout un écosystème qui en profitait comme les ours polaires et les phoques.

Les conséquences de la diminution de la banquise arctique sont nombreuses et potentiellement majeures :

- changements climatiques et météorologiques ;

- augmentation indirecte du niveau des océans ;

- modification de la circulation océanique avec la crainte d’un refroidissement brutal en Europe ;

- impacts sur les communautés humaines qui dépendent de la glace ;

- impacts sur les plantes et les animaux qui dépendent de la glace ;

- modification des routes de navigation et ouverture de territoires pour la prospection géologique et pétrolière.

L’Arctique sans banquise devrait avoir des conséquences significatives sur les écosystèmes océaniques, les rétroactions biogéochimiques, les conditions météorologiques extrêmes et le climat dans les moyennes et hautes latitudes. Cela affectera également les activités maritimes et commerciales de l’Arctique, y compris l’expédition, le transport et l’exploration de l’énergie, engendrant des bouleversements majeurs mais aussi des opportunités stratégiques qui n’ont pas échappé aux grandes puissances lancées dans cette course folle depuis quelques années…

Lorsque la banquise fond, le niveau de l’eau n’augmente pas directement puisque le passage de l’état solide à l’état liquide de l’eau n’induit pas une augmentation du volume d’eau. C’est la fonte des glaciers terrestres qui contribue à l’élévation du niveau des océans.

Cependant, lorsque la banquise fond, l’océan arctique se réchauffe car le pouvoir réfléchissant (mesuré via l’albédo) de l’eau par rapport aux rayons du soleil, est très inférieur à celui de la glace. Ainsi, l’océan arctique absorbe plus de rayonnement solaire, se réchauffe et augmente son volume par dilatation thermique. En outre, les glaciers continentaux pourraient fondre plus facilement à cause d’une région globalement plus chaude.

Qu’en est-il de la glace de mer en Antarctique ? Dans l’hémisphère sud, les saisons sont opposées, c’est à dire que le printemps débute lorsque l’automne arrive dans l’hémisphère nord. Autrement dit, mi-septembre correspond au maximum d’étendue de glace de mer dans l’hémisphère sud. En février 2022, la banquise antarctique a toutefois atteint une étendue minimale record (depuis le début des observations satellites en 1978) à cause d’une vague de chaleur inédite.

Étonnamment, l’étendue de la banquise le 20 février 2022 était de 2 128 000 km2, la plus petite en plus de 40 ans d’observations. C’est aussi une valeur minimale (73,3%) par rapport à l’étendue minimale moyenne de 2 902 000 km2 pour chaque année de 2012 à 2021.

Mais contrairement à l’Arctique, les vents et les courants océaniques spécifiquement liés à l’océan Austral et à l’Antarctique ont une forte influence sur l’étendue de la banquise. En effet, la glace de mer dans l’Arctique est entourée de terres, tandis que la glace de mer dans l’Antarctique n’est entourée que d’océan et peut donc s’étaler plus librement.

Depuis le début des relevés effectués par Copernicus Marine en 1993, l’étendue de la banquise antarctique et plutôt stable avec même une légère augmentation, sauf si le record de l’année 2022 se confirme par la suite… Ou si les glaciers ne fondent pas (Cf. Thwaites).

Bruno Bourgeon http://www.aid97400.re

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