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Traduction d’AID pour Les-crises.fr n° 2019-27

L’Italie s’apprête à appuyer la nouvelle Route de la Soie Chinoise.

par Davide Ghiglione, Demetri Sevastopulo, Michael Peel et Lucy Hornby, traduit par Jocelyne le Boulicaut

mardi 2 avril 2019, par JMT

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L’Italie s’apprête à appuyer la nouvelle Route de la Soie Chinoise.

Le 6 mars 2019 3h50 par Davide Ghiglione à Rome, Demetri Sevastopulo à Washington, Michael Peel à Bruxelles et Lucy Hornby à Pékin

La Maison-Blanche s’en prend à cet accord qui risque d’alarmer Bruxelles.

L’Italie s’apprête à devenir le premier pays du G7 à approuver officiellement la campagne mondiale pourtant controversée de la Chine en faveur de la Route de la Soie , une initiative qui a déclenché une vive réaction de la part de la Maison-Blanche et qui va vraisemblablement éveiller les craintes de Bruxelles.

Michele Geraci, sous-secrétaire au ministère du Développement économique, a déclaré au Financial Times que fin Mars, lors de la visite du président chinois Xi Jinping en Italie, Rome prévoyait de signer un accord de coopération pour soutenir un programme d’infrastructures pourtant controversé .

"La négociation n’est pas encore terminée, mais il est possible qu’elle soit conclue à temps pour la visite [de Xi] ", a déclaré M. Geraci dans une interview. "Nous voulons nous assurer que les produits " Made in Italy " rencontreront plus de succès en termes de volume d’exportation vers la Chine, le marché à plus forte croissance au monde.

Cette décision a toutefois suscité de vives critiques du côté de la Maison-Blanche, qui a déclaré qu’il était peu vraisemblable que ce projet aide l’Italie sur le plan économique et qu’il pourrait même nuire considérablement à l’image internationale du pays.

"Nous considérons la NRS [Belt and Road Initiative : Nouvelle Route de la Soie, NdT] comme une initiative " conçue par la Chine, pour la Chine ", a déclaré au Financial Times Garrett Marquis, porte-parole du Conseil national de sécurité de la Maison-Blanche. "Nous sommes sceptiques quant aux avantages économiques durables que cette approbation du gouvernement italien pourrait apporter au peuple italien, et elle pourrait même à long terme finir par nuire à la réputation mondiale de l’Italie."

M. Marquis a déclaré que les responsables américains avaient fait part de leurs préoccupations au sujet de ce qu’il appelait les effets négatifs de la "diplomatie chinoise en matière d’infrastructures" et a exhorté "tous les alliés et partenaires, y compris l’Italie, à faire pression sur la Chine pour qu’elle réajuste ses investissements mondiaux pour suivre les normes et meilleures pratiques internationales acceptées".

Le plan NRS de la Chine vise à financer et construire des infrastructures dans plus de 80 pays en Eurasie, au Moyen-Orient et en Afrique. Mais les États-Unis et les principaux pays européens craignent qu’il ne favorise les entreprises chinoises, qu’il ne crée des pièges d’endettement pour les États bénéficiaires et qu’il ne soit utilisé pour renforcer l’influence stratégique et militaire de Pékin.

Plusieurs pays d’Europe centrale et orientale, ainsi que certains États d’Asie, du Moyen-Orient et d’Afrique, ont accepté de signer des protocoles d’accord bilatéraux en ce sens. Les documents sont généralement confidentiels et les engagements exacts ne sont pas clairs, mais ils contiennent souvent des phrases affirmant que le pays concerné "apprécie et soutient vivement la NRS".

Le soutien de l’Italie à la NRS chinoise saperait la pression américaine sur la Chine en matière commerciale et minerait les efforts de Bruxelles pour surmonter les divisions au sein de l’UE quant à la meilleure approche pour traiter les investissements chinois. L’Italie est un des membres fondateurs de l’UE.

M. Xi doit arriver en Italie le 22 mars pour sa première visite en tant que Président. Selon le bureau du président italien, il doit rencontrer Sergio Mattarella, le président italien, et assister à un dîner officiel. Le dirigeant chinois devrait également rencontrer Giuseppe Conte, premier ministre italien, et assister à une cérémonie militaire avant de se rendre en Sicile.

Cette visite ferait immédiatement suite à une réunion de l’UE le 21 mars à Bruxelles au cours de laquelle les États membres de l’UE doivent débattre d’une approche commune quand aux investissements chinois dans l’UE. Un sommet séparé avec des représentants de Pékin est prévu dans la capitale belge le 9 avril.

Les investissements chinois sont devenus de plus en plus controversés au sein de l’UE. Les diplomates de Bruxelles et des capitales influentes d’Europe occidentale s’inquiètent depuis longtemps du fait que le regroupement des 16+1 formé par la Chine et les États d’Europe centrale et orientale, dont 11 membres de l’UE, puisse de fait être un cheval de Troie pour diviser l’UE. Pékin a démenti

Certains états membres de l’UE comme l’Allemagne et la France ont fait pression pour la mise en place de critères de sélection plus stricts concernant les investissements chinois. Ils veulent que le bloc développe une stratégie plus homogène dans un contexte de tensions croissantes en matière d’ implications sécuritaires que peut avoir l’utilisation de la technologie chinoise par des entreprises telles que Huawei, le groupe de télécommunications.

D’autres pays, dont la Grèce et le Portugal, où des groupes chinois ont investi des milliards d’euros depuis la crise financière, ont adopté une approche plus complaisante.

Lors d’un voyage à Pékin, l’année dernière, après des semaines de tension diplomatique,Theresa May, la Premier ministre britannique, a refusé de soutenir par écrit la NRS.

Cette semaine, Zhang Yesui, porte-parole de l’Assemblée populaire nationale, a déclaré que 67 pays avaient adhéré à la NRS depuis environ un an. Cela porterait à 152 le nombre total de pays ou d’organisations internationales qui ont officiellement adhéré.

M.Zhang a souligné que les décisions entre la Chine et ses partenaires sont prises dans la concertation.

"La Chine prend la question de la dette très au sérieux et, dans le cadre d’un projet, la partie chinoise n’impose jamais rien et surtout, ne crée jamais de pièges d’endettement," a-t-il dit. "Bien sûr, comme dans toute coopération internationale, on peut voir surgir certains problèmes et défis. Avec l’expérience, ça va s’améliorer."

Reportages complémentaires de James Kynge à Hong Kong et James Politi à Washington.

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