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38ème chronique de la Macronésie

CM38-L’immigration est-elle une charge pour les pays d’accueil ?

par Dr Bruno Bourgeon, président d’AID

vendredi 30 mars 2018, par JMT

Encore un domaine où la Macronésie, pas plus que les gouvernements qui l’ont précédée n’est capable de poser clairement les problèmes. On a déjà traité par ailleurs de ce qui amène des immigrés en France, quelquesoit leur qualité. Mais le choix d’accepter ou pas des immigrés en fait n’est pas posé de manière telle qu’on puisse lui apporter une réponse, parce que "le bon sens populaire" qui fait faire aux ignorants sortis de leur milieu les pires des conneries, entraîne ceux qui ignorent le fonctionnement d’une économie moderne à croire :

a) que les immigrés sont mieux traités que les indigènes

b) qu’ils "coûteraient" donc aux indigènes via la dépense publique payée par les impôts et cotisations sociales

c) que ce serait une cause d’appauvrissement du pays.

CES TROIS ASSERTIONS SONT TOTALEMENT FAUSSES.

Non les immigrés, réfugiés, etc... ne sont certainement pas FAVORISES par rapport aux indigènes, même si dans certains cas très particuliers on a l’impression qu’ils disposent d’une aide financière publique (mais d’ailleurs souvent privée !) supérieure. Allons mettre un indigène français en situation d’immigration dans la plupart des pays du monde et on verra s’ils n’ont pas besoin de plus de ressources que les indigènes de ces pays pour survivre ! Il faut de plus penser que dans la plupart des cas, ces personnes, qui pourtant veulent travailler, DOIVENT le faire au noir parce qu’on leur interdit de travailler, qu’ils sont exploités par leurs employeurs et par leurs logeurs.

Les études montrent par ailleurs que au pire les immigrés coûtent autant qu’ils rapportent (car on oublie toujours que quelqu’un qui a une vie normale, avec des revenus, par le simple fait qu’il dépense génère indirectement de la richesse nationale !) et que, en réalité, ils rapportent de l’argent ! Ils n’appauvrissent pas le pays car , lorsqu’on leur permet de travailler, ils acceptent les emplois que les indigènes refusent.

De plus les pays pauvres qui voient leurs maigres élites éduquées les fuir pour aller vers les pays riches SUBVENTIONNENT les pays riches en leur fournissant de la main d’oeuvre éduquée : les USA estiment à plus de 120.000 $ le coût de l’éducation d’un jeune jusqu’à ses 18 ans !

En revanche on pourrait dire que l’immigration est, comme l’énergie fossile pas chère, une vraie drogue dont il faut absolument se défaire pour survivre, car elle freine l’évolution des pays riches sur la voie de la nécessaire diminution de leur population pour leur permettre d’assurer à celle-ci le revenu individuel souhaité sans dépasser l’empreinte écologique permise par leur territoire. Nos sociétés modernes ont besoin de moins en moins de main d’oeuvre pour les productions matérielles, et l’automation, l’informatisation, l’intelligence artificielle et la robotisation sont parfaitement capables POUR PEU QU’ON LES RESERVE AUX TACHES INDISPENSABLES et pas au superflu, et qu’on s’y mette immédiatement, de tenter de sauver le confort pour lequel les 4 ou 5 générations qui nous ont précédé se sont battues ! Le rendement de l’être humain étant énergétiquement catastrophique (un être vivant utilise moins de 0,2% de l’énergie primaire nécessaire à sa vie)

L’immigration est-elle une charge pour les pays d’accueil ?

La France est l’un des pays développés qui accueillent le moins d’immigrés et un de ceux où la part des immigrés dans la population est la plus basse.

Sur le terrain économique et social, l’immigration est ambivalente :

-  A court terme, elle peut contribuer à accroître le chômage ainsi que la pression sur les salaires et les conditions de travail, dans la mesure où les nouveaux immigrés sont souvent prêts à accepter des conditions d’emploi inférieures à celles que les résidents recherchent. C’est une des raisons pour lesquelles les chefs d’entreprise sont généralement favorables à une immigration significative. Et dans un contexte où les logements sont en nombre insuffisant, l’arrivée de nouveaux immigrés peut aggraver les tensions sur ce marché.

-  D’un autre côté, les immigrés et leurs familles apportent au pays qui les reçoit un surcroît de consommation, qui soutient l’activité. Contrairement à ce qu’on prétend, les immigrés jouent aussi un rôle plutôt favorable du point de vue du financement des systèmes sociaux : ce sont des personnes jeunes, qui, lorsqu’elles sont employées légalement, contribuent à financer les retraites des résidents.

Or ce sont en majorité des personnes qualifiées qui ont tenté leur chance dans les pays développés. Ce qui pose problème : la volonté des pays développés de privilégier la seule immigration de personnes qualifiées (informaticiens, infirmières, médecins...) aggrave la situation des pays de départ. Enfin, les immigrés sont souvent, à moyen terme, une source importante de dynamisme économique et de renouvellement du tissu des entreprises, du fait d’une volonté plus affirmée que dans d’autres groupes sociaux de progresser en matière de statut social dans le pays d’accueil.

Finalement, l’impact économique de l’immigration sur les pays d’accueil dépend beaucoup des politiques menées dans les dits pays. Dans un contexte où les politiques publiques favorisent la régulation du marché du travail, soutiennent le logement social et la protection sociale, l’immigration peut contribuer à accélérer l’activité sans nuire au bien-être des résidents. A contrario, dans un pays où on veut à tout prix libéraliser le marché du travail et réduire les dépenses publiques, elle risque de contribuer à aggraver la situation des couches populaires.

Mais avons-nous le choix ? Dans un monde où les écarts démographiques sont importants et où le changement climatique redessine les zones favorables aux activités humaines, peut-on raisonnablement éviter des migrations significatives ? Et ne vaut-il pas mieux, dans un tel contexte, essayer de s’y adapter dans les meilleures conditions, pour les résidents comme pour les nouveaux arrivants ? Plutôt que de tenter vainement de bloquer les flux en encourageant au passage une économie criminelle à grande échelle, comme c’est toujours le cas avec des politiques de prohibition ?

Les immigrés posent en effet d’autant moins problème aux pays d’accueil, notamment en matière de dumping social, qu’ils n’y séjournent pas illégalement en y étant condamnés au travail au noir.

Dr Bruno Bourgeon, président d’AID

D’après Alternatives économiques du 20 mars 2018

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PUBLICATION DANS LES MEDIAS LOCAUX

* Courrier des lecteurs de Zinfos974 du Jeudi 29 Mars 2018 - 09:45

* Courrier des lecteurs dans Le Quotidien de la Réunion du

* Courrier des lecteurs dans Imaz Press Reunion

Quelle réalité de l’immigration en France ?

Par Anthony Edo

Migrants réfugiés en Grèce (Crédits : Reuters)

L’économie internationale en campagne, avec le CEPII. Questions à Anthony Edo, économiste au CEPII.

-La France est-elle un pays d’immigration massive ?

Oui elle l’a été... à la fin des années 1920, lorsque le pays affichait un taux d’immigration record devant les États-Unis, ou dans les années 1950-1960. Aujourd’hui, avec en moyenne 200 000 immigrés (définis comme des personnes nées étrangères à l’étranger) qui sont entrés chaque année sur le territoire français entre 2004 et 2012 selon l’INSEE ou 235 000 en 2013, soit entre 0,3 % et 0,4 % de la population française, on est loin d’un phénomène massif. A titre de comparaison, ce chiffre correspond à l’arrivée de 291 supporters dans un Stade de France de 81 000 places. Avec un tel taux d’immigration, la France est en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE, qui s’établit à 0,6 %. En outre, pour évaluer de façon pertinente le flux d’immigrés, il faut soustraire aux 235 000 entrées de 2013 les 95 000 immigrés qui ont quitté la France cette année là, ce qui porte le flux net d’entrées d’immigrés à 140 000.

Une autre façon de répondre à la question est de quantifier la contribution des migrations à la croissance de la population française. Pour cela, il convient de comparer le flux net d’immigrés au solde naturel (naissances moins décès). En 2013, la France comptait 243 000 naissances de plus que de décès. L’apport de l’immigration net à la croissance de la population française est donc de moins de 40 % (140 000 / (243 000 + 140 000)). A comparer aux presque 200 % que représente l’apport des migrations à la croissance de la population allemande, du fait d’un solde naturel négatif lié à une fécondité en berne.

-Donc pas tant d’entrées nettes que ça chaque année. Mais qu’en est-il de la présence immigrée en France ?

Au siècle dernier, la part des immigrés dans la population française est passée de 6,6 % en 1931 à 7,4 % en 1975, puis s’est stabilisée jusqu’au milieu des années 1990. En 2014, l’INSEE a recensé un peu moins de six millions d’immigrés en France, soit 8,9 % de la population. Parmi eux, 3,6 millions sont de nationalité étrangère et 2,3 millions, soit 39 % des immigrés, ont acquis la nationalité française. Selon l’OCDE, la France se situe ainsi au 17ème rang des pays développés pour la part d’immigrés dans la population ; en Allemagne et aux Etats-Unis, par exemple, 13 % de la population est immigrée en 2013.

-Ces chiffres sont-ils conformes à la perception que les Français en ont ?

Loin de là. Les Français interrogés en 2010 par le Transatlantic Trend Survey estimaient que la part des immigrés était de 24 % alors qu’elle n’était que de 8,5 %. Cette surestimation du nombre d’immigrés qui résident dans leur pays n’est d’ailleurs pas propre aux Français. Les Allemands et les Américains, par exemple, estiment le pourcentage d’immigrés dans leur population respective à 22 % et 37 %, bien au-delà des 13 % réels.

< Ces écarts sont-ils liés à l’immigration irrégulière ?

Chiffrer l’immigration irrégulière est par définition difficile. Mais si l’on s’appuie sur les 282 000 demandes de l’aide médicale d’État offerte en 2013 aux étrangers en situation irrégulière ou même sur le chiffre plus élevé qui circule de 500 000 immigrés en situation irrégulière, la part des immigrés dans la population française n’atteint pas 10 %. On est toujours loin de la perception des Français.

-Mais alors pourquoi un tel écart ? Est-ce dû à l’inégale répartition des immigrés sur le territoire ?

Probablement. La très forte concentration locale des immigrés et leur surreprésentation dans des quartiers précarisés et modestes peut conduire les Français à estimer qu’il en va ainsi ailleurs et donc à surestimer le nombre d’immigrés dans le pays.

Cet écart entre le chiffre et la perception tient aussi à des confusions, comme celle entre immigrés et personnes nées en France de parents immigrés qui, par définition, n’en sont pas. Cependant, si on ajoute à la population immigrée les individus nés en France dont au moins l’un des deux parents est immigré, on obtient une proportion d’environ 19 % de la population française en 2011, ce qui pourrait indiquer que cette confusion contribue à l’écart observé. Le regroupement familial fait l’objet d’une autre confusion lorsque le discours politique en fait la principale source d’immigration en France, alors qu’il a représenté moins de 24 000 personnes immigrées en 2014 selon le ministère de l’intérieur, soit 11 % seulement du total. C’est un dispositif qui permet aux étrangers vivant en France de faire venir conjoint et enfants de moins de 18 ans. Il ne faut pas le confondre avec l’entrée des membres étrangers de familles de Français sur le territoire qui représente la plus forte composante des admissions au séjour pour motif familial (99 374 personnes).

-Cette perception de l’immigration peut-elle changer ?

Pour cela, il faut informer davantage. Une étude réalisée par des chercheurs des universités d’Oxford et Bocconi montre clairement que les individus, lorsqu’ils sont informés des chiffres de l’immigration, sont moins enclins à considérer que les immigrés sont trop nombreux.

Source : INSEE

Propos recueillis par Isabelle Bensidoun & Jézabel Couppey-Soubeyran

- Pour aller plus loin : lire l’article sur le site de la Tribune pour voir l’origine de tous les chiffres cités (liens)

Chojnicki X. et Ragot L. [2012], « Pour une refondation de la politique migratoire française », Billet de Blog du CEPII, 18 juin.

Edo A. [2016], « Migrations et mouvements de réfugiés : état des lieux et conséquences économiques », in CEPII L’économie mondiale 2017, La Découverte, « Repères », Paris.

Grigorieff A., Roth C., Ubfal D. [2016], « Does Information Change Attitudes Towards Immigrants ? Evidence from Survey Experiments », Available at SSRN : https://ssrn.com/abstract=2768187, November 12.

Héran F. [2005], « Cinq idées reçues sur l’immigration », Population et Sociétés, n° 397.

Insee Première [2014], Les immigrés récemment arrivés en France, n° 1524, novembre.

VIDEO : Immigration : on raconte n’importe quoi !

Par Alexandre Mirlicourtois, Xerfi

L’immigration concentre beaucoup d’idées reçues, c’est pourquoi voilà cinq séries de chiffres clés pour cadrer le phénomène migratoire et dissiper quelques malentendus. Mais avant, mettons-nous d’accord sur les termes. Selon la définition officielle, un immigré est une personne née étrangère à l’étranger et résidant en France. La qualité d’immigré est donc permanente. Autrement dit, un individu reste immigré toute sa vie même s’il devient français, c’est la grande différence avec le statut d’étranger.

Premier chiffre combien !

Début 2014, la France comptait, selon l’Insee, 5 millions 868 mille immigrés. Cela représente 8,9% de la population totale. En prenant, la notion plus étroite d’étrangers comme proxy du poids de la population immigrée, cela placerait la France assez bas dans le classement en Europe selon les chiffres d’Eurostat.

Deuxième chiffre important, celui du solde migratoire, c’est-à-dire les entrées sur le territoire diminuées des sorties (départ ou décès).

D’après l’INSEE, le solde est positif, c’est donc un excédent qui serait, depuis trois ans, d’environ 47.000 individus par an. Relativement stable depuis 2007, ce solde diminue nettement depuis le début des années 2000. Ce chiffre de 47.000 est à confronter à celui de l’excédent naturel (naissance moins décès donc), de 234.000 par an en moyenne ces 3 dernières années.

En d’autres termes, l’immigration nette explique aujourd’hui un peu moins de 17% de la croissance de la population française. Fin des années 60 et début des années 70, ce chiffre était légèrement supérieur à 30% en France métropolitaine. Troisième série de statistiques : d’où viennent-ils ? Il faut distinguer les immigrés récemment arrivés en France de ceux plus anciennement installés. Selon la Banque mondiale, les Algériens représentent un peu moins de 20% de la population immigrée. Les Marocains un peu plus de 12% : 1 immigré sur 3, ou presque, vient donc de ces deux pays. Suivent les Portugais, les Tunisiens et les Italiens. La barre des 50% est alors franchie. Les Espagnols, les Turcs, les Allemands, les Belges, le Vietnamiens, complètent le top 10. Les flux réguliers en provenance des anciennes colonies expliquent en partie cette hiérarchie comme les grandes vagues migratoires ouvrières européennes précédentes.

Aujourd’hui, l’immigration est essentiellement européenne

Entre 2009 et 2012, le nombre d’entrées d’Européens a progressé de 12% par an et explique plus d’une entrée sur 2. Une évolution surtout liée aux entrées massives en provenance du Portugal, d’Espagne et d’Italie. Trois pays particulièrement touchés par la crise économique. L’immigration en provenance d’Afrique progresse, elle, bien plus lentement (1% par an) avec une baisse du contingent algérien et une hausse des effectifs marocains et encore plus tunisiens. Les entrées en provenance d’Amérique-Océanie grimpent de 4% mais, moins nombreuses, elles impactent moins le bilan total, tout comme la baisse du nombre de ressortissants venus d’Asie. Autres chiffres sur les caractéristiques du migrant moyen... qui est en fait une migrante. 54% des migrants arrivés sur le territoire sont des femmes qui migrent de plus en plus pour trouver un emploi en adéquation avec leur diplôme ou pour poursuivre leurs études. C’est un autre fait, 63% des nouveaux migrants ont au moins l’équivalent du Bac ou plus. Ce n’est finalement pas surprenant, car ce sont généralement les moins défavorisés et parfois les plus nantis des communautés qui émigrent.

L’âge moyen d’un migrant est de 28 ans

Nous sommes loin de l’image d’Épinal de l’immigré. Quant au taux de fécondité, selon la dernière statistique de 2008 il est de 2,8 enfants par femme immigrée contre 1,9 pour l’ensemble des femmes résidentes en France. Comme les immigrées ne représentent que 10% des femmes en âge d’avoir des enfants, le taux de fécondité total n’est impacté que de 0,1 point. Non, l’immigration n’est ni massive ni sous-diplômée, ni la première source d’accroissement naturel de notre population.

Le bilan objectif de l’immigration en France

Par Anne-Marie Rocco le 17.05.2015 à 09h31, mis à jour le 17.05.2015 à 09h31

"Menace" selon les uns, "force" pour les autres… Les statistiques ethniques étant interdites, les études économiques sont rares. Mais toutes démontrent l’apport positif des immigrés dans le PIB. Etat des lieux.

Manifestation à Marseille BORIS HORVAT / AFP

Peur de l’invasion, rejet de l’autre, repli sur soi : partout sur la planète, l’immigration enflamme les opinions publiques. En France, attentats terroristes, jihad, antisémitisme et menaces contre les églises ont entamé la belle unité républicaine affichée lors de la marche du 11 janvier. Une étude du Crédoc, publiée fin avril, montre que le regard des Français sur les banlieues s’est durci depuis 2009 : moins d’empathie, moins de solidarité, et une demande renforcée de sécurité. Même observation face aux drames à répétition qui se succèdent en Méditerranée, dont le bilan est de plus de 2.000 morts depuis le début de l’année. Non seulement ils n’ont pas mobilisé les opinions, mais le sommet extraordinaire de l’Union européenne, le 23 avril à Bruxelles, a accouché d’une souris.

Au lendemain de la réunion des Vingt-Huit à Berlin, le Tageszeitung réagissait en publiant en une la photo des principaux leaders d’extrême droite, avec ce titre-choc : "Le gouvernement secret de l’Union européenne". Leurs idées seraient-elles devenues dominantes ? "Il y a trop d’immigrés en France", martèle Marine Le Pen, qui met "le creusement de nos déficits sociaux" sur le compte de "l’immigration de masse". Ses slogans font mouche : selon un sondage Ifop-Atlantico du 4 février, 68% des Français considèrent qu’"on en fait plus pour les immigrés que pour eux", et estiment à 81% qu’il faut passer "de l’immigration subie à l’immigration choisie". Nicolas Sarkozy surfe sur la vague : "On ne peut pas continuer comme ça" avec l’immigration, dit-il, car elle "menace notre façon de vivre".

Autres latitudes, mêmes obsessions : des violences xénophobes touchent l’Afrique du Sud, tandis qu’en Australie le gouvernement conservateur de Tony Abbott se vante d’avoir "stoppé les morts en mer". Il a purement et simplement interdit l’arrivée des bateaux, d’où une chute des demandes d’asile de 24% l’an dernier. Rares sont les initiatives pour tenter de calmer les angoisses face aux migrations planétaires. Exception notable. Outre-Manche, le Mouvement contre la xénophobie a organisé une campagne pour contrer le discours anti-immigrés de Nigel Farage, le leader du parti populiste UKIP : "Je suis un immigré. Depuis sept ans, je sauve des vies. Peut-être la vôtre, bientôt", lit-on sur l’une des quinze affiches placardées dans le métro londonien.

En France, la classe politique souffle sur la braise depuis longtemps. En 1977, Valéry Giscard d’Estaing créait l’aide au retour et durcissait les conditions d’entrée sur le territoire. En 1981, la gauche annule ces dispositions. En 1986, nouvelle alternance, Charles Pasqua fait voter une loi très restrictive. Le sujet devient explosif entre la gauche et la droite. "Marche des beurs", collectifs anti-expulsions, régularisations… Jacques Chirac dénonce "le bruit et l’odeur". Giscard d’Estaing parle de "risque d’invasion"… Avec les années 2000 apparaissent les thèmes de l’identité nationale et de l’immigration choisie.

Flux de plus en plus européen

L’immigration a pourtant eu des effets positifs, en termes de dynamisme. Et c’était le sens du discours de François Hollande, le 15 décembre dernier, à l’inauguration du musée de l’Histoire de l’immigration – une institution voulue par Jacques Chirac, mais boudée par Nicolas Sarkozy. Ce jour-là, le président affirme vouloir "rendre aux immigrés la place qui leur revient". Pour lui, ils représentent une "force" qui a, pendant les Trente Glorieuses, construit "l’équivalent d’un logement sur deux, d’une machine sur sept et de 90% des autoroutes de notre pays". Une force, aussi, qui irrigue le pays puisque, aujourd’hui, "un Français sur quatre a au moins un grand-parent étranger". La France : un melting-pot, une petite Amérique, comme le pense aussi Mercedes Erra ? Est-ce toujours le cas ?

Pour répondre, il faudrait pouvoir analyser les chiffres froidement. Or les statistiques ethniques sont interdites. Et bien peu d’économistes se sont hasardés sur ce terrain miné. En 2010, une étude de Xavier Chojnicki, professeur d’économie à l’université de Lille, concluait à une contribution "positive" de l’immigration sur le budget de l’Etat de l’ordre de 12 milliards d’euros. L’OCDE, en 2013, posait un diagnostic plus nuancé, compte tenu de l’important taux de chômage des immigrés (25% en 2012).

En tout cas, selon une étude de l’Insee, "Les immigrés récemment arrivés en France", publiée en novembre 2014, sous la signature de Chantal Brutel, l’immigration n’est pas exponentielle. "De 2004 à 2012, 200.000 immigrés sont entrés chaque année, en moyenne, sur le territoire français", affirme l’experte. Un chiffre qui n’évolue guère et qu’il faut relativiser. Il est, en effet, impossible d’additionner le nombre de ces arrivants pour conclure que, au bout de dix ans, il y aurait 2 millions d’immigrés de plus en France.

Certains rentrent chez eux – une grande partie des 60.000 étudiants – tandis que d’autres vieillissent et meurent, le solde annuel net s’établissant autour de 90.000 personnes. L’immigration, ajoute l’Insee, devient "de plus en plus européenne" : le Vieux Continent représente 46% du flux, contre 30% pour les pays d’Afrique, 14% pour l’Asie et 10% pour l’Amérique et l’Océanie. A 55%, ces Européens arrivent d’ailleurs en France en ayant déjà un emploi, contre 21% pour les Africains. Il s’agit, souligne l’Insee, "de nouveaux arrivants de plus en plus diplômés".

Le ressenti des Français

Ces chiffres-là, pourtant, ne correspondent guère au ressenti des Français. D’abord, parce que leur perception se fonde plus sur la masse des 5,8 millions d’immigrés déjà installés que sur les flux. Or les populations originaires du Maghreb, souvent victimes de phénomènes de ghettoïsation, sont encore très largement majoritaires. Là se pose un problème d’intégration. Et puis ces études ne mesurent pas ce qui fait la une des médias sous ses aspects les plus dramatiques : l’immigration clandestine. L’agence Frontex parle de l’arrivée de 274.000 illégaux en 2014 dans l’Union européenne. Contre un peu plus de 100.000 en 2013. La France n’est pas la plus touchée, mais c’est cette immigration clandestine qui alimente toutes les peurs et tous les fantasmes.

Idée reçue n°2/10 : l’immigration coûte cher à la France

Publié le 13 février 2018 par ATD Quart Monde

Faux. Selon les études, elle ne coûte presque rien ou, au contraire, rapporte.

Nous avons vu que les immigrés contribuaient à augmenter la richesse par habitant d’un pays comme la France. Ils créent de la richesse et de l’emploi, car ils sont aussi consommateurs, cotisants et contribuables (TVA et autres impôts). Ils apportent également une diversité culturelle et professionnelle qui favorise l’économie du pays d’accueil(1).

Les populations immigrées perçoivent moins de prestations que les natifs pour ce qui est de l’assurance maladie et de l’assurance vieillesse (les deux postes les plus importants de la protection sociale), et davantage qu’eux pour ce qui est des aides au logement, du RSA, des allocations familiales et des allocations chômage. Par ailleurs, leur apport est important en termes de cotisations sociales, de taxes sur la consommation, de CSG et d’impôts.

Le tableau suivant, établi pour l’année 2005, montre que l’immigration représente un coût de 68 milliards d’euros et des recettes de 72 milliards, donc un apport net de presque 4 milliards :

Recettes Montant annuel Dépenses Montant annuel
en millions € en millions €
Impôts sur revenus du travail 3 414 Retraite 16 365
Impôts sur revenus du capital 3 350 Logement 2 593
Taxes sur la consommation 18 335 RMI 1 740
Impôts locaux 2 541 Chômage 5 047
CSG-CRDS 6 215 Famille 6 724
Cotisations sociales 26 457 Santé 11 154
Autres recettes 11 714 Éducation 4 222
Autres dép. 20 295
Total 72 026 Total 68 140
Impact budgétaire net +3 885

Source : Xavier Chojnicki et Lionel Ragot, op. cit.

Dans sa première étude sur le sujet(2), l’OCDE fait apparaître un impact fiscal légèrement négatif en 2008-2009 pour les familles immigrées vivant en France (– 1 451 € par an et par personne en 2007-2009), qui s’explique par le fait que celles-ci sont relativement âgées et donc un peu moins en emploi, et sans doute aussi par les premiers effets de la crise de 2008. Pour la plupart des pays, remarque cependant l’OCDE, l’impact de l’immigration est positif(3). L’emploi étant le principal facteur de contribution fiscale des immigrés, l’OCDE invite les pays à une meilleure intégration des immigrés dans le marché du travail.

ATD Quart Monde publie l’édition 2017 de l’ouvrage de référence qui démonte les idées fausses. Indispensable plus que jamais en période électorale.