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Préparons-nous à vivre l’effondrement

Lettre au Préfet de La Réunion, chargé de la protection des populations face aux risques du changement climatique.

par Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID

vendredi 11 octobre 2019, par JMT

D’après le GIEC et la COP21 de Paris de décembre 2015, si nous voulons que nos enfants et petits-enfants survivent aux conséquences d’un réchauffement climatique inférieur à 2°C d’ici 2100, nous devons baisser de 50 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 11 ans. Or le gouvernement a récemment pris des mesures pour restreindre ces émissions à 40%. Malgré tout elles augmentent de 3 % par an. A ce rythme, nous allons vers +3°C ou +4°C, c’est-à-dire la mort de 75% de l’humanité. D’autres dangers mortels menacent nos enfants : perte de la biodiversité qui soutient l’équilibre des systèmes agricoles, sécheresses agricoles et carences en eaux potables, carences en engrais phosphatés ou azotés, empoisonnements par les pesticides, etc.

Lettre au Préfet de La Réunion, chargé de la protection des populations face aux risques du changement climatique.

Monsieur le Préfet,
Nous soutenons par ce courrier les recours en justice engagés à l’encontre des préfets de régions, pour manquements à l’obligation d’action contre le changement climatique.

En tant que représentants des DREAL, les préfets de région ont pour missions :

  • D’élaborer et mettre en œuvre les politiques de l’État en matière d’environnement, de développement et d’aménagement durables
  • De développer et diffuser la connaissance sur le changement climatique et ses effets sur la population.

D’après le GIEC et la COP21 de Paris de décembre 2015, si nous voulons que nos enfants et petits-enfants survivent aux conséquences d’un réchauffement climatique inférieur à 2°C d’ici 2100, nous devons baisser de 50 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 11 ans. Or le gouvernement a récemment pris des mesures pour restreindre ces émissions à 40%. Malgré tout elles augmentent de 3 % par an. A ce rythme, nous allons vers +3°C ou +4°C, c’est-à-dire la mort de 75% de l’humanité. D’autres dangers mortels menacent nos enfants : perte de la biodiversité qui soutient l’équilibre des systèmes agricoles, sécheresses agricoles et carences en eaux potables, carences en engrais phosphatés ou azotés, empoisonnements par les pesticides, etc.

En quoi les mesures prises par les préfets de région garantissent-elles une baisse de 50% des GES d’ici 11 ans ? Comment les préfets de région alertent-ils les populations sur ces risques mortels à venir ?

Nous sommes en « guerre contre le climat » : le gouvernement le dit… M. le Préfet, en temps de guerre, vous devez agir, désobéir si la politique gouvernementale ne répond pas aux exigences climatiques. Les préfets de région ne sont pas soumis aux enjeux des mandats politiques électoralistes : pourquoi n’agissez-vous pas plus efficacement localement ?

Afin d’assurer un avenir à nos enfants, et devant le constat que les politiques de croissance verte sont trop lentes (- 13% d’énergies renouvelables en moins dans la part de l’énergie en 2016) nous vous apportons notre soutien si vous prenez des mesures radicales d’urgence de protection des populations. Nous sommes prêts à accepter les conséquences économiques et la baisse de notre confort d’un État d’Urgence Climatique.

Citoyens informés, nous ne nous faisons plus berner de mots et de discours : un plan environnemental digne de ce nom doit contenir :

  • Une réduction des productions non essentielles (gadgets hi-tech, emballages plastiques, produits de luxe...), dont la perte en emplois sera compensée par des programmes de reconversion des salariés dans les métiers de la réparation et du recyclage.
  • Une reconversion aux énergies renouvelables des industries fonctionnant encore aux énergies fossiles.
  • Une généralisation du fret de marchandises et des transports en commun pour les personnes (transports : +11% des GES en 2017 en France).
  • Un arrêt des subventions à l’agriculture conventionnelle au profit de l’agriculture de conservation ; limitation des élevages industriels (18% des émissions de GES et gaspillage des eaux potables) et des céréales destinées à ces élevages.
  • Une limitation des projets immobiliers (bâtiment : +23% des GES en 2017 en France), notamment sur des terres agricoles : l’équivalent d’un terrain de foot de terre agricole disparaît en France toute les 5 minutes ! Protégeons la souveraineté alimentaire de nos enfants !

Aucun programme de transition écologique qui ne reprenne ces points essentiels ne saurait être sérieusement reconnu. Si la vie de nos enfants continue d’être mise en danger pour maintenir une politique économique fondée sur la croissance, sans que les préfets n’interviennent, il est à prévoir que certains d’entre nous, par amour pour leurs enfants, prendront eux-mêmes des mesures de protection, et vous ne pourrez alors leur en tenir rigueur, puisqu’ils auront paré à vos manquements...

Avec tout le respect que nous gardons pour la noblesse de vos missions, nous vous prions de croire, M. le Préfet, en l’assurance de notre considération distinguée.

Pour l’Association Initiatives Dionysiennes, les membres du bureau :
Aline Dagut, présidente,
Christiane Sudnikowicz, relations publiques,
Loïc Damey, commissaire au revenu de base et au bénévolat associatif,
Eric Chane-Po-Lime, commissaire à la monnaie locale complémentaire,
Jean-Marc Tagliaferri, trésorier-webmestre
Bruno Bourgeon, porte-parole

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LA PETITION

Changements climatiques : protégeons nos enfants !
38.146 signatures

la vidéo de la pétition

PUBLICATION MEDIAS LOCAUX

* Courrier des lecteurs dans Zinfos974 du Vendredi 11 Octobre 2019 - 15:04

* Courrier des lecteurs dans Clicanoo.re du 11 octobre 2019, 12h09

* Tribune Libre d’Imaz Press Réunion du

* Courrier des lecteurs de Témoignages.re du 12 Octobre 2019

* Courrier des lecteurs dans Le Quotidien du

Une illustration des ravages déjà installés du réchauffement climatique

Le coup de chalumeau dans les vignes du Midi n’est pas une calamité agricole

Je suis vigneronne.
Je n’écris pas en qualité de vigneronne.
Je n’écris pas non plus en qualité de vigneronne victime d’une calamité agricole, d’une catastrophe naturelle ou d’un accident climatique.

Ce qui s’est produit dans les vignes du Gard et de l’Hérault vendredi 29 juin, est d’une tout autre nature, d’un tout ordre, ou plus exactement d’un tout autre désordre.

J’écris en qualité de témoin du changement climatique à l’œuvre, qui est en fait un bouleversement, qui ne concerne pas ici des vignerons, là des arboriculteurs, hier des pêcheurs, demain des Parisiens asphyxiés, mais bien tous, citadins ou ruraux, habitants du Sud comme du Nord, de l’Ouest, ou de l’Est.

J’écris en qualité d’hôte de la terre. Nous sommes chacun, individuellement, interdépendants les uns des autres.

J’étais vendredi matin dans les vignes pour faire un tour d’inspection des troupes et ramasser des abricots dans la haie de fruitiers que j’ai plantée en 2010 entre les terret et les cinsault. Il faisait déjà très chaud. Je ne sais pas combien, je ne veux pas ouvrir le livre des records.

Je suis rentrée au frais, et je me suis plongée dans la lecture d’un livre passionnant, La vigne et ses plantes compagnes de Léa et Yves Darricau. J’ai repoussé la plantation de 30 ares de vignes à l’origine programmée pour cette année, à plus tard, à quand je saurai comment et quoi planter. Je cherche. A 18 heures, Laurent, mon voisin de vignes avec qui je fais de l’entraide, m’appelle :
- Là-haut à Pioch Long, les syrah sont brûlées.
- Comment ça brûlées ?
- Oui, brûlées, les feuilles, les raisins, comme si on les avait passé au chalumeau.

J’ai pris ma voiture, et je suis allée dans les vignes. Quand j’ai vu à La Carbonelle, les grenaches, feuilles et grappes brûlées, grillées, par zones, sur la pente du coteau exposée sud-ouest, je n’ai pas pensé à la perte de la récolte.

J’ai vu que certaines étaient mortes, que d’autres ne survivraient pas. Il faisait encore très très chaud et j’ai été parcourue de frissons. La pensée m’a traversée que c’était là l’annonce de la fin de l’ère climatique que nous connaissons, la manifestation de la limite de l’hospitalité de la terre.

Puis je suis passée sur le plateau de Saint-Christol, là où depuis le XIIème siècle l’homme a planté des vignes pour qu’elles bénéficient pleinement des bienfaits du soleil et du vent. Et là, à droite, à gauche, j’ai vu des parcelles de vignes brûlées, grillées dans leur quasi totalité.

Il y aura des voix, celles des porte-parole des vignerons, chambre d’agriculture, représentants des AOC, et c’est leur rôle, pour évaluer les pertes de récolte, la mortalité des ceps, et demander des indemnisations.

Il y aura les voix invalidantes de la culpabilité, celle des gestes que l’on a faits dans la vigne les jours précédents et que l’on n’aurait peut-être pas dû faire, ou ceux que l’on n’a pas faits et que l’on aurait dû faire. Et si j’aurais su…. A ceux-là, je réponds, les si n’aiment pas les rais.

Il y aura des voix pour dire qu’à cela ne tienne, on va généraliser l’irrigation, et si cela ne suffit pas, eh bien on plantera des vignes, plus haut dans le Nord, ailleurs. Peut-être même y en aura-t-il pour s’en réjouir. A ceux-là, je réponds qu’ils sont, au mieux des autruches, au pire des cyniques absolus et immoraux, dans les deux cas des abrutis aveugles.

Ce qui s’est produit ce vendredi 29 juin dans les vignes du Midi, est un avertissement, un carton rouge. Ce n’est pas seulement les conséquences d’un phénomène caniculaire isolé doublé d’un vent brûlant, mais la résultante de trois années successives de stress hydrique causé par des chaleurs intenses et de longues périodes de sécheresse qui, année après année, comme nous prenons chaque année des rides, ont affaibli les vignes, touchant ce vendredi 29 juin, celles qui étaient plantées dans ce qui était jusqu’alors considéré comme les meilleurs terroirs. C’est aussi la résultante d’un demi-siècle de pratiques anagronomiques.

La Carbonelle est plantée de vignes depuis 1578. C’est un mamelon en forme de parallélogramme bien exposé au vent et soleil. Ce qui s’est passé le 29 juin, dit que l’ordre des choses s’est littéralement inversé. Le vent et soleil ne sont plus des alliés de l’homme. La solution de l’irrigation est la prolongation d’un défi prométhéen. On se souviendra qu’il lui arrive quelques bricoles à Prométhée.

Cela dit aussi que le changement va plus vite que la science agronomique et ses recherches appliquées, cela nous précipite dans un inconnu. Il nous faut radicalement changer notre rapport à la terre, ne plus nous en considérer comme des maîtres, mais des hôtes, que l’on soit paysan ou citadin.

Ceux qui voudraient circonscrire à la viticulture du Midi ce qui s’est produit le 29 juin s’illusionnent. Le phylloxéra a été identifié en 1868 à Pujaud dans le Gard. Les vignerons des autres régions ont cru ou feint de croire qu’ils seraient épargnés. En 1880, le puceron avait éradiqué la totalité du vignoble français, et gagné toute l’Europe. Le phylloxéra était lui-même la « récompense » de notre quête du mieux, du plus. Il a été à l’origine de la seule grande émigration française et d’une reconstruction du vignoble qui a profondément changé l’équilibre même de la vigne. Nous en sommes les héritiers directs.

Ceux qui voudraient circonscrire le phénomène à la viticulture se dupent aussi. La vigne nous accompagne, sur notre territoire, depuis plus de deux millénaires, et l’homme depuis plus de 6 000 ans. Sa culture est tout à la fois un pilier et un symbole de notre civilisation. Si la vigne n’a plus sa place dans le Midi, l’homme ne l’aura pas davantage car le soleil et le vent seront brûlure sur sa peau.

Nous, vignerons, devons en tout premier lieu renouer avec la dimension métaphysique de notre lien à la terre et alors, nous pourrons changer radicalement nos pratiques. Mais il faudra autant de temps pour retricoter ce que nous avons détricoté.

L’œuvre elle-même est vaine si par ailleurs, nous, vous, moi continuons à prendre l’avion comme nous allons promener le chien, goûtons aux fruits exotiques comme si on les cueillait sur l’arbre, mettons la capsule dans la machine à café comme un timbre sur une lettre, ainsi de suite. Ce que les vignes disent, c’est que notre civilisation elle-même est menacée.

Les abeilles l’ont aussi dit, avant la vigne. Mais nous ne les avons pas entendues. "

Catherine Bernard

corroboré par cet article du 29 Juin 2019 du Midi Libre :"Hérault : des vignes ont été "littéralement grillées" par la chaleur