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Proposition d’un économiste atterré

Fini le néolibéralisme, c’est l’heure de la planification écologique et sociale

par Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID

jeudi 9 juillet 2020, par JMT

Après le confinement, nous sommes devant deux stratégies. La première est de reprendre le projet d’Emmanuel Macron : rattraper le retard de la France sur les pays libéraux ; rendre les entreprises françaises de plus en plus innovantes et compétitives ; réduire les réglementations et le droit du travail ; baisser les cotisations sociales et les impôts sur les entreprises.

Fini le néolibéralisme, c’est l’heure de la planification écologique et sociale

Après le confinement, nous sommes devant deux stratégies. La première est de reprendre le projet d’Emmanuel Macron : rattraper le retard de la France sur les pays libéraux ; rendre les entreprises françaises de plus en plus innovantes et compétitives ; réduire les réglementations et le droit du travail ; baisser les cotisations sociales et les impôts sur les entreprises.

Cela suppose de réduire les dépenses publiques, en particulier les dépenses sociales, en arguant des dettes de la crise sanitaire. Dans cette optique, la crise du Covid est utilisée comme une nouvelle justification. Les contraintes écologiques sont oubliées, comme les promesses aux « premiers de corvée ». Ce sera : « La croissance d’abord » ou « on en a déjà trop fait pour l’écologie ».

La seconde stratégie consiste à prendre au sérieux le tournant écologique, ce qui implique de mettre en œuvre un certain nombre de règles, de contraintes sur les entreprises et les ménages, de relancer la fiscalité écologique, notamment la taxe carbone, en la compensant pour les classes populaires, et de contrôler strictement les innovations, car celles-ci ne sont utiles que si elles ont un impact favorable sur l’environnement et la cohésion sociale.

L’objectif consiste ici à concilier le mieux possible le bien-être de la population et les contraintes écologiques. Cela demande un contrôle rigoureux de la production, qui pourra passer par l’adoption d’une autorisation de mise sur le marché, comme pour les produits pharmaceutiques : un produit ne doit pouvoir être introduit que s’il apporte un plus au niveau du bien-être, s’il est durable, s’il est moins polluant.

Le problème du gouvernement est qu’il n’a pas de plan cohérent de sortie de crise.
Les 149 propositions de la CCC (Convention Citoyenne pour le Climat) - enfin, 146 après les 3 jokers de Macron, et 144 après les objections de Le Maire - forment une rupture, mais qui ne va pas assez loin, qui ne tire pas toutes les conséquences.

Par exemple, elle propose une taxe carbone aux frontières sans évoquer clairement une taxe carbone interne, qui en est la condition préalable. Ou sans évoquer un quota carbone. Elle souhaite mettre des contraintes sur le comportement des ménages, mais sans contrôler les choix de production.

L’apport de la CCC est utile, mais ne va pas au fond des choses, car il ne met pas en cause le fait que la production et la consommation sont déterminées par les entreprises en fonction des intérêts des dirigeants et des actionnaires, pas en fonction de choix sociaux.

Tant que les grandes entreprises dépendront de leurs actionnaires, et donc des marchés financiers, avec des objectifs de croissance et de rentabilité, ce sera faussé. Il faut remettre en cause la manière dont sont prises les décisions. Elles doivent être socialement construites.

C’est-à-dire qu’il faut une planification écologique et sociale qui détermine, branche par branche, les grands choix stratégiques à l’intérieur desquels elles doivent s’inscrire, avec le soutien de l’Etat et d’un secteur financier public.

Par exemple, choisir de maintenir un secteur agricole en France de produits de qualité suppose des prix minima rémunérateurs. Dans l’industrie, on peut décider de ne plus construire de SUV gloutons, de voitures trop rapides. Une politique de crédit orientée vers la transition écologique doit pénaliser fortement les crédits accordés à des sociétés qui produisent du CO2 ou consomment de l’énergie carbonée.

Les entreprises doivent établir des plans d’investissement en tenant compte de la hausse attendue du prix de l’énergie. Un vaste programme de rénovation thermique des logements exige qu’on aide non seulement les ménages à financer les travaux, mais aussi les entreprises à former leurs personnels.

Une planification sociale signifie que ce sont des choix sociaux qui orientent la production, non l’inverse. Cela implique la présence dans les conseils d’administration de personnes qui représentent ces choix. Pour l’heure, ces personnes sont des hauts fonctionnaires, qui prennent place dans les instances de décision des grandes entreprises celles qui ont un impact global sur l’économie.

Ces représentants de l’Etat sont chargés d’exprimer les choix sociaux. C’est possible : le compromis social-écologique. Mais ne plus développer des besoins artificiels, se donner l’objectif de satisfaire les besoins de base pour l’ensemble de la population, en limitant les dégâts écologiques ou en les réparant, demande un tournant dans la manière de gérer l’évolution économique. La planification écologique et sociale doit remplacer le néolibéralisme. La croissance ne doit plus être l’objectif.

Dans une stratégie de rupture, on remet en cause l’Inspection des finances ou la Cour des comptes, dont les membres sont formés pour la plupart à Sciences Po et à l’ENA, et qui ne représentent pas les choix sociaux, mais les classes dirigeantes, l’oligarchie financière.

Le mode de recrutement doit être revu. Le ministère de l’Industrie doit être irrigué par des personnes issues du syndicalisme, des organisations de masse, des mouvements sociaux, qui veillent à l’application du tournant écologique et social du pays. Pour cela, il faut aussi une rupture démocratique avec les institutions actuelles.

Si on ne veut pas revenir au premier terme de l’alternative, la sortie néolibérale, celle de l’insertion de la France dans la concurrence mondiale avec tous les abandons environnementaux, et les dégâts sociaux que cela entraîne, si l’on ne veut pas que la transition écologique frappe les plus pauvres et épargne les plus riches, il faut remettre en cause la manière dont les choix se font dans les entreprises.

Il existe cependant une solution intermédiaire, qui consiste à prendre en compte les contraintes écologiques, mais de manière compatible avec le capitalisme, c’est-à-dire ne rien changer dans le fonctionnement de l’économie, mais uniquement augmenter le prix des émissions des gaz à effet de serre. C’est la position de Jean Tirole et de Christian Gollier, pour qui il suffit d’augmenter les prix, la transition écologique se fera par le jeu des marchés.

Mais une telle transition pèserait sur les plus pauvres, premières victimes des hausses de prix. Elles ne mettraient pas en place les investissements publics et privés, qui permettront la transition. De plus, on ne peut laisser perdurer, ni les inégalités de statut et de salaire dans les entreprises, ni la domination de la finance et corriger par la hausse de la fiscalité sur les riches.

Il faut mettre les mains dans le cambouis, dans les choix des entreprises. Ne pas être démagogue : augmenter le niveau de vie des pauvres, surtout baisser celui des riches. L’objectif d’une société égalitaire et sobre l’impose. La transition écologique se traduira par des pertes de pouvoir d’achat, par des changements de mode de vie des classes moyennes-supérieures. Dur de réaliser une transition écologique et sociale qui sera perçue comme une perte de liberté.

L’alternative est un monde inégalitaire et déstructuré où une étroite minorité jouit d’un niveau de vie agréable tandis que la masse subit les contraintes écologiques.
Pour l’heure, il n’y a pas d’alliance politique autour d’un tel programme. Mais comme le programme néolibéral est en panne, le débat est plus ouvert qu’on ne le pense. Car les classes dirigeantes n’ont pas de voie. Leurs deux extrêmes sont difficiles à gérer : ignorer la contrainte écologique est devenu impossible, difficile de balayer les tensions sociales que les gilets jaunes et la crise sanitaire ont révélées.

La CCC a ouvert des pistes, mais il reste des contradictions : montrer que les transformations sont plus profondes qu’annoncées, développer l’idéologie pour modifier les perceptions des citoyens. Il n’est pas impossible de convaincre l’opinion que les choix des entreprises peuvent être faits autrement, que les gaspillages, les revenus exorbitants, les inégalités sont insupportables.

Après la crise de 2008, même Alain Minc ne défendait plus le capitalisme financier. Il faut renverser la hiérarchie des valeurs. Voilà le combat.

Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID
D’après Henri Sterdyniak, des Economistes Atterrés

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Henri Sterdyniak : « La planification écologique et sociale doit remplacer le néolibéralisme »

01/07/2020 par Henri Sterdyniak Conseiller scientifique à l’OFCE

Après le coronavirus, quelques réflexions d’Henri Sterdyniak :

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