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62 ème chronique de la Macronésie

CM62 - Où l’on reparle encore de Monsanto

par Dr Bruno Bourgeon, président d’AID

mardi 24 juillet 2018, par JMT

Monsanto, que ton nom sent si bon l’horreur ! Voilà 44 ans que, sous prétexte d’augmenter les rendements et de baisser les coûts, la molécule phare, le glyphosate, qui a fait la fortune de la firme, empoisonne les sols, les plantes, les animaux et les humains au point que l’urine des eurodéputés testés contient une concentration de ce poison égale à 17 fois la norme.

La pression médiatique devenant trop forte, il a été imaginé de faire disparaître le nom Monsanto du paysage médiatique en la faisant absorber par le géant allemand Bayer, dont les pubs envahissent les écrans du service public. Pas étonnant que la France,et son éminent et médiatique Ministre d’Etat, ministre de la transition écologique, spécialement chargé de l’avalage de couleuvres, soit si peu pressée de faire interdire cette molécule dont on peut très bien se passer en changeant de méthodes de cultures et en revenant à des variétés plus diverses et donc moins sensibles aux maladies.

L’intérêt de l’entourloupe est aussi de rendre plus délicats les recours juridiques contre une firme disparue, Bayer pouvant, à juste droit, refuser de "porter le chapeau".... A condition de ne plus produire ni commercialiser de produits à base de glyphosate. Ce qui ne serait, dit-on, même pas une grande perte car des pays "low-cost" et 40 entreprises produisent déjà des succédanés "génériques" depuis que le brevet est tombé en 2000 !

On peut être certains en revanche que dans la corbeille de mariée, Monsanto a apporté son expertise en matière de semences compatibles avec les pesticides, sa capacité à produire des OGM et quelques monstruosités dignes de son passé où elle a travaillé pour le projet Manhattan, fabriqué de l’agent Orange pour la guerre du Vietnam, produit le très toxique PCB pour les transformateurs électriques et des hormones de croissance transgénique pour bovins.

Bref comme dit l’adage populaire "qui se ressemble s’assemble". Ce n’est pas une coïncidence si une entreprise si sulfureuse a accepté de se marier avec Bayer, qui fut la branche pharmaceutique du "konzern" IG Farben qui a, entre autres horreurs, soutenu sans faille le nazisme et produit le Zyklon B utilisé à Auschwitz. L’IG Farben était très populaire aux USA et comme d’autres konzerns elle bénéficia des attentions de Prescott Bush , père et grand-père de deux présidents étatsuniens.

Malgré tout, l’IG Farben a été démantelée en 1952 en douze sociétés héritières, dont Agfa, BASF, Hoechst, Bayer AG et Dynamit Nobel, toujours des fleurons économiques germaniques. La Bayer AG d’après guerre a quelques nouvelles belles casseroles et notamment de produire le gaucho, insecticide qui extermine les abeilles, après avoir avant la Ière guerre mondiale inventé l’ypérite, tristement célèbre gaz de combat qui déjà exterminait les humains.

Où l’on reparle encore de Monsanto

Comment faut-il parler de Monsanto ? Bayer a eu beau la racheter, pour devenir numéro deux mondial de l’industrie agro-chimique, l’entreprise américaine fait à nouveau parler d’elle.

Non contente d’avoir fait l’objet d’un tribunal fictif à La Haye, filmé par Marie-Monique Robin : "Le Roundup face à ses juges", un premier procès pénal se tient en Californie, et concerne tout aussi bien le monde entier, contre Monsanto.

En Argentine, troisième producteur mondial de soja, l’usage des pesticides est très répandu, comme ici dans les champs de la province de Santiago del Estero. ALVARO YBARRA ZAVALA

Dewayne Johnson, 46 ans, va mourir. Pendant deux ans, entre 2012 et 2014, il répandit avec son vaporisateur du Roundup sur des terrains scolaires. Désormais atteint d’un lymphome non hodgkinien incurable, défendu par une myriade d’avocats, il accuse Monsanto d’avoir caché la cancérogénicité du produit.

L’un de ses avocats : "Ce procès est comme un canari dans la mine". Dit autrement, ce procès n’est que le premier d’une longue suite. Monsanto n’ayant provisionné "que" 235 millions d’euros pour contrer les litiges, on souhaite bien du plaisir à Bayer.

Jusqu’à présent, le seul cancer véritablement environnemental reconnu est le mésothéliome, causé par l’amiante : une maladie, une seule cause. Pour tous les autres cancers, on ne peut rien affirmer : une infinité de molécules, certaines synergiques, sont impliquées dans la genèse des cancers, maladies environnementales s’il en est. Ces molécules esquintent l’ADN, mais comment, quelle exposition, quels résultats, nul ne peut le dire.

Le Centre International pour la Recherche sur le Cancer (CIRC) a classé le glyphosate comme cancérogène probable (IIa). Classification évidemment contestée par Monsanto, mais pas que : l’Efsa, agence européenne de sécurité des aliments, farcie de conflits d’intérêts, est également dans la danse.

Admettons que le glyphosate ne soit pas cancérogène. Dans ce cas, notre presse main stream et l’AFP jouent un jeu écoeurant : le glyphosate est "une substance très controversée et qui fait l’objet d’études scientifiques contradictoires". Vrai et faux, attention, voici le point Godwin selon la formule de Godard : "L’objectivité, c’est 5 min pour Hitler, et 5 min pour les Juifs".

En effet on aime oublier la désinformation de l’industrie pendant des lustres, au moyen d’une gigantesque stratégie du doute (1). Ainsi les prodigieux "tobacco papers" tuant sciemment des millions de fumeurs. Ainsi le Comité Permanent Amiante (CPA) gagnant 20 ans avant son interdiction définitive en 1997. Ainsi les moyens crapuleux utilisés par Monsanto pour discréditer le CIRC, en magouillant les articles pseudo-scientifiques écrits par ses sbires, en utilisant des espions professionnels , en menant une campagne de l’ombre.

Plus personne ne peut désormais ignorer que Monsanto, je pèse mes mots, est une entreprise criminelle. Ceux qui la défendent en sont complices : je parle des autorités européennes, qui va de la Commission aux ministres de l’écologie, suivez mon regard, mais aussi une presse "objective" qui ment "objectivement". Procès à suivre jusqu’à fin juillet.

(1) : "Les Marchands de doute", de Naomi Oreskes et Eric Conway, Editions Le Pommier, 2012 ; "La Fabrique du mensonge", de Stéphane Foucart, Editions Denoël, 2013

Dr Bruno Bourgeon, président d’AID, www.aid97400.re
D’après Charlie-Hebdo n°1356

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PASSAGES SUR RADIO ET TELE A LA REUNION

suite la condamnation de Monsanto à une amende record de 289,2 millions $ dans le procès de Dewayne Johnson, les deux télés et radio-réunion ont fait appel à Bruno Bourgeon :

* Radio Réunion du 14/8/2018 à 6h30 de 3’02" à 4’35"

* Réunion Première du 13/8/2018 à 19h30 de 5’45" à 13’08" (en plateau)

* Antenne-Réunion du 13/8/2018 à 19h00 : de 1’21" à 5’20"

* Antenne Réunion du 13/8/2018 à 12h30 : de 9’59" à 11’19"

PUBLICATION DANS LES MEDIAS LOCAUX

* Courrier des lecteurs de Zinfos974 du Mercredi 25 Juillet 2018 - 11:29

* Courrier des lecteurs dans Imaz-Press Réunion publié le Mercredi 25 Juillet à 15H22, actualisé le Mercredi 25 Juillet à 15H24

* Courrier des lecteurs dans Le Quotidien de la Réunion du 29 Juillet 2018

Procès Monsanto : la santé du plaignant au coeur des débats

Par AFP• Dernière MAJ : 23/07/2018

La santé de Dewayne Johnson, atteint d’un cancer en phase terminale qu’il attribue à l’herbicide Roundup de Monsanto, était au centre des débats lundi lors du procès qu’intente cet Américain à la multinationale aux Etats-Unis.

"Ma vie a complètement changé" après le diagnostic en 2014, a notamment déclaré Dewayne "Lee" Johnson, autrefois très sportif, qui témoignait lundi, de sa voix au timbre grave, devant un tribunal de San Francisco (ouest).

A 46 ans, ce père de deux garçons souffre d’un lymphone non-hodgkidien, incurable, qu’il attribue au fait d’avoir vaporisé, dans le cadre de son travail, en 2012 et 2014 du RoundUp et du RangerPro, deux herbicides commercialisés par le géant agrochimique Monsanto.

C’est la première fois que Monsanto, qui vient d’être racheté pour l’allemand Bayer, se retrouve sur le banc des accusés pour des effets potentiellement cancérigènes de ces produits contenant du glyphosate, une substance controversée.

Alors que M. Johnson "faisait tout dans la maison", il ne peut plus aider son épouse, Araceli, a-t-il dit, suscitant quelques sourires dans l’assistance, en parlant de ses enfants ou de la répartition des tâches ménagères.

Avant le diagnostic, "on n’avait pas de soucis, pas de stress, la vie était belle", a témoigné peu avant son épouse, contrainte désormais de travailler 14 heures par jour et d’avoir deux emplois pour "aider avec les factures", son mari n’étant plus en mesure de travailler.

Quand elle a appris la maladie, son monde "s’est effondré". "Je ne voulais pas y croire", raconte-t-elle à la barre, sourire inquiet et voix faible.

- Silence de la défense -

Aujourd’hui, "c’est très difficile, très stressant, c’est trop (dur) d’expliquer ce que je ressens", ajoute-t-elle, racontant les moments de détresse de son mari, où endurant la chimiothérapie, il "pleurait en cachette".

L’audience avait débuté par le témoignage du Dr Ope Ofodile, dermatologue, l’un des médecins de Johnson en 2014 et 2015. Elle a notamment commenté des photos de lésions sur le corps de M. Johnson ou encore sa réponse aux premiers traitements.

Face aux témoignages chargés d’émotion, les avocats de Monsanton sont pour l’heure restés silencieux, se gardant de poser des questions.

Entre 2012 et 2014, M. Johnson a vaporisé sur des terrains scolaires d’une petite ville de Californie, dans l’ouest des Etats-Unis, du Roundup ainsi que du RangerPro, produit similaire au Roundup.

Selon M. Johnson, c’est leur principe actif, le glyphosate, qui a causé sa maladie, et Monsanto a sciemment dissimulé sa dangerosité alors qu’il aurait dû en informer le public.

"Monsanto sait depuis 40 ans que les composants de base du Roundup peuvent provoquer des tumeurs chez des animaux de laboratoire", avait affirmé l’un des avocats du plaignant, Brent Wisner, au premier jour du procès, le 9 juillet.

La tâche de l’accusation est ardue car il s’agit de convaincre les jurés du lien entre les produits au glyphosate de Monsanto et le cancer de Dewayne Johnson alors que celui-ci n’a pas été prouvé scientifiquement en dépit de longues années de débat.

De son côté, Monsanto s’est attaché depuis le début du procès à réfuter tout lien entre glyphosate et cancer, études scientifiques à l’appui, qui sont, elles, contestées par les détracteurs du glyphosate.

"Le cancer de M. Johnson est une maladie terrible et nous devons tous avoir la plus grande empathie pour l’épreuve qu’il traverse", avait pris soin de souligner l’un des avocats du groupe Monsanto à l’ouverture du procès, George Lombardi.

- Etudes sujettes à caution ? -

"Les preuves scientifiques montrent que les produits à base de glyphosate ne provoquent pas le cancer et n’ont pas entraîné le cancer de M. Johnson", avait-il toutefois argué.

La défense de M. Johnson a dit espérer "le plus possible" en dommages et intérêts de la part de Monsanto, qui fait l’objet de milliers de procédures en justice aux Etats-Unis.

Contrairement à l’agence fédérale américaine de protection de l’environnement (EPA), la Californie, où se trouve San Francisco, a placé le glyphosate sur la liste des produits cancérigènes.

Le glyphosate est aussi classé "cancérigène probable" depuis 2015 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), mais pas par les agences européennes, l’Efsa (sécurité des aliments) et l’Echa (produits chimiques).

Plébiscité par les cultivateurs pour son efficacité et son faible coût, il fait particulièrement polémique en Europe et notamment en France.

Le procès Monsanto devrait durer au moins jusqu’au mois d’août.

LIENS

* Monsanto chez Wikipédia

* Glyphosate chez Wikipédia

* Bayer chez Wikipédia

* IG Farben chez Wikipédia

* COMBAT MONSANTO

* Comment faut-il parler de Monsanto ? Par Fabrice Nicolino - 18/07/2018

Premier procès pénal dans l’immense affaire du Roundup. Cela se passe en Californie, mais concerne tout aussi bien la France. Au-delà des faits eux-mêmes, notre presse traite Monsanto en oubliant un menu détail : il s’agit d’une entreprise criminelle, et tout le monde devrait le savoir depuis longtemps.