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Suite du débunkage de la propagande officielle

L’espérance de vie a-t-elle réellement chuté de façon inédite en 2020 ?

par Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID

vendredi 16 avril 2021, par JMT

L’espérance de vie a-t-elle réellement chuté de façon inédite en 2020 ?

Le 19 janvier 2021, l’Insee a publié son bilan démographique de l’année 2020 en décidant de mettre comme titre « Avec la pandémie de Covid-19, nette baisse de l’espérance de vie et chute du nombre de mariages ». Avide de sensations, la presse s’est emparée de ce titre pour expliquer à quel point la situation était grave. Le 29 mars, Les Échos titrait ainsi : « La mortalité au plus haut depuis 70 ans en France », et précisait dans le chapeau : « La mortalité a augmenté de 9% en 2020, a révélé l’Insee lundi.

Une situation dont la Covid porte quasiment l’entière responsabilité. Elle coûte aux Français un peu plus de six mois d’espérance de vie à la naissance ». On voit qu’ici le journaliste va jusqu’à déformer les chiffres de l’Insee pour les exagérer (6 mois au lieu de 4 pour les femmes et 5 pour les hommes) ! Reste que l’Insee affirme clairement : « En 2020, la pandémie a fait perdre 0,4 an d’espérance de vie aux femmes et 0,5 an aux hommes ». C’est donc bien l’Insee lui-même qui affirme un lien de causalité direct. La réalité est pourtant plus complexe.

Comme le savent (et devraient s’en rappeler) tous les démographes depuis le début de leur formation professionnelle, l’espérance de vie est un indicateur qui fait partie de la famille des indicateurs-agrégats. C’est-à-dire qu’il est construit en additionnant des choses très différentes et aux évolutions multiples. Par ailleurs, la sémantique est elle-même trompeuse. En effet, le mot « espérance » n’a rien à voir avec le mot « espoir ». Il s’agit en réalité d’un terme utilisé en mathématiques et qui signifie « moyenne pondérée ».

En outre, l’espérance de vie ne vous renseigne pas sur votre avenir, c’est juste une image de notre présent. L’espérance de vie en 2020 est une moyenne standardisée de l’âge de toutes les personnes décédées en 2020. Elle nous donne une idée de l’âge des morts de 2020, en tenant compte de la structure par âge. La durée de vie que vous pouvez espérer n’a rien à voir avec celles des personnes décédées en 2020.

Si l’on veut maintenant observer l’évolution de cette moyenne pondérée de l’âge des personnes décédées chaque année, il faut préalablement s’assurer que l’on va bien comparer des choses comparables. Il faut, en particulier, comparer à nombre égal et à âge égal. Et le résultat est que 2020 n’est pas la pire des années. Elle est par exemple moins mortelle que 2015 et que toutes les années avant 2014.

La moyenne standardisée de l’âge des décès d’une population, que l’on appelle donc « l’espérance de vie », repose sur un calcul. Pour faire ce calcul, il faut d’abord récupérer sur le site de l’Insee la population française âge par âge , avec les dernières données actualisées sorties en 2020 , et les décès âge par âge , pour chaque année sur laquelle vous voulez calculer l’espérance de vie.
Et ceci peut être différencié pour chacun des deux sexes. Pour simplifier, nous les fusionnerons ici, de même que nous nous concentrerons sur la France métropolitaine.

L’Insee a donc choisi de commenter le fait que l’espérance de vie 2020 est plus faible que l’espérance de vie 2019. De fait, il est exact que l’espérance de vie à la naissance a diminué de 0,4 ans. Nous parvenons nous aussi à une espérance de vie de 81,74 ans en France métropolitaine en 2020, alors que l’on avait 82,12 en 2019.

Cela fait 0,38 de moins soit une perte de 4 mois et 15 jours environ (et non « plus de six mois » comme écrit le journaliste des Échos). Mais comparons maintenant cette espérance de vie aux années précédentes avec les calculs de l’Insee. On constate alors l’espérance de vie 2020 est plus élevée que l’espérance de vie 2015.

Autrement dit l’âge de décès standardisé est plus élevé en 2020 qu’en 2015 : en 2020 on meurt plus vieux qu’en 2015 et même que toutes les années avant 2015 aussi. Or ce n’est pas là-dessus que l’Insee a choisi d’insister. Le message de l’Insee se voulant résolument alarmiste, il insiste sur la comparaison entre 2020 et 2019.

Reprenons donc cette comparaison spécifique. En moyenne, les morts de 2020 étaient un peu plus jeunes qu’en 2019, puisque l’espérance de vie est finalement plus faible. Mais constate-t-on davantage de morts à tous les âges ou bien uniquement à certains âges spécifiques ? Le problème d’une moyenne globale qui baisse est en effet que l’on ne sait pas si la baisse est générale ou spécifique. Pour cela, nous avons comparé le nombre de survivants âge par âge comme expliqué précédemment. Attardons-nous un instant sur la différence du nombre de survivants âge par âge en 2020 et 2019 pour savoir à chaque âge en quelle année nous trouvons le plus de survivants. La courbe est positive lorsqu’il y a plus de survivants en 2020 qu’en 2019 et négative sinon.

Dans le calcul de l’espérance de vie que donne l’Insee, il n’est pas précisé où se trouvent les gains et les pertes. Or, pour tous les âges jusqu’à 60 ans, on trouve davantage de survivants en 2020 qu’en 2019. Les moins de 60 ans représentent 75% de la population française. Ils sont moins morts en 2020 qu’en 2019. La hausse de mortalité ne concerne que les plus de 60 ans. En 2020, les jeunes sont moins morts qu’en 2019. La perte d’espérance de vie se situe uniquement après 60 ans. Et elle atteint son maximum entre 77 et 98 ans.

Revenons à présent à l’observation de notre espérance de vie sur une plus longue durée. Nous constatons qu’elle augmente de manière régulière depuis 2010, mais avec des variations annuelles significatives. Il y a des années où elle est plus haute et d’autres où elle est plus basse. Les années 2012, 2015 et 2020 sont en recul. Mais toutes avaient été précédées par une année ou l’espérance de vie avait au contraire fortement augmenté et se situait au-dessus de la tendance : 2011, 2014 et 2019.

On retrouve ce résultat lorsque l’on regarde les décès en France métropolitaine. On constate que les décès augmentent depuis 2010 du fait du vieillissement des baby-boomers, et que cette augmentation est assez régulière. On voit bien les phénomènes de creux en 2011, 2014 et 2019 suivis de bosses en 2012, 2015 et 2020. Ces 3 années sont donc des rattrapages des années précédentes : c’est l’effet de moisson dont je vous ai déjà parlé.

Si l’espérance de vie a bien reculé d’environ 4 mois en 2020 par rapport à 2019, il n’est pas scientifiquement acceptable de s’en tenir à ce constat pour développer des interprétations générales. Trois autres constats doivent a minima être eux aussi pris en compte dans les raisonnements.

Le premier est que cette baisse de la moyenne générale que constitue « l’espérance de vie » concerne uniquement les personnes âgées de plus de 60 ans, et surtout celles âgées de 77 à 98 ans.

Le second est que cette baisse d’une année sur l’autre est à replacer dans une temporalité plus large qui indique que la baisse 2019-2020 n’a rien d’exceptionnelle. Elle s’est au contraire déjà produite à deux autres reprises au cours des dix dernières années. La baisse de 2020 est seulement plus forte que les précédentes.

Enfin, le troisième constat est que l’alternance de ces années de hausse et de baisse de l’espérance de vie constitue un phénomène classique sur le plan épidémiologique.

Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID www.aid97400.re

D’après le blog de Laurent Mucchielli sur Mediapart, et les données de Pierre Chaillot, statisticien

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