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Traduction d’AID pour Les-crises.fr n° 2021-72

Les dessous de la Maison Blanche à la mode Fox News - Deuxième partie

Par Jane Mayer, traduit par Jocelyne le Boulicaut

samedi 10 juillet 2021, par JMT

AID soutient financièrement le très intéressant site "Les-crises.fr" depuis plusieurs années. Nous avons fait un pas de plus en participant aux traductions des textes anglais quand le site fait appel à la solidarité de ses adhérents. Nous avons donc mandaté une de nos adhérentes, Jocelyne LE BOULICAUT, enseignante universitaire d’anglais retraitée, pour y participer en notre nom et nous indemnisons son temps passé avec notre monnaie interne

Les dessous de la Maison Blanche à la mode Fox News - Deuxième partie

Le 4 mars 2019 Par Jane Mayer

Jane Mayer, la correspondante en chef du New Yorker à Washington, est l’autrice de "Dark Money".

Boeuf bedeau (Illustration The New Yorker)

De leur côté, Ailes et un petit groupe surveillaient de près les talents internes. « Nous avions un dossier sur à peu près tout le monde », a déclaré l’ancien cadre de Fox, ajoutant qu’Ailes parlait de "porter des coups" dans les médias à l’encontre de toute personne qui "dépassait les bornes". Si une femme se plaignait d’être harcelée sexuellement, Shine ou d’autres supérieurs hiérarchiques l’intimidaient pour la faire taire, réduisaient son temps d’antenne ou mettaient fin à son contrat. L’ancien cadre se souvient : « Shine parlait à la femme avec un gant de velours, en lui disant : "Ne t’inquiète pas pour ça" - et, si ça ne marchait pas, il la prévenait que cela ruinerait sa carrière. »

Les partisans de Shine maintiennent qu’il a été injustement sali par les scandales de harcèlement d’Ailes. « Il a été victime d’un réel maccarthysme sexuel », m’a dit LaCorte. Van Susteren note que Shine « n’a jamais été accusé d’avoir eu un comportement compromettant - il a été accusé d’avoir détourné le regard ». Elle ajoute : « Il fait partie de ces gens de la direction qui éteignent les incendies. Bien souvent, ces personnes s’y brûlent les ailes. »

Mais dans au moins quatre procès civils contre la Fox, Shine est cité comme prévenu pour avoir permis le harcèlement au travail. L’une de ces affaires, un procès d’actionnaires pour lequel Fox a négocié, en 2017, un arrangement à hauteur de quatre-vingt-dix millions de dollars, affirmait qu’Ailes avait « harcelé sexuellement des employées et des contributrices en toute impunité pendant au moins une décennie » en s’entourant « de ses loyaux partisans » - parmi lesquels Shine. Le procès reproche à Fox d’avoir dépensé cinquante-cinq millions de dollars pour régler de telles plaintes à l’amiable.

L’utilisation de fonds de l’entreprise pour des pots-de-vin a déclenché une enquête criminelle du bureau du procureur des États-Unis à Manhattan. En 2017, Shine a été cité à comparaître devant un grand jury, mais il a préféré accepter d’être interrogé par les procureurs. L’enquête criminelle semble avoir été abandonnée après la mort d’Ailes, mais Judd Burstein, un avocat dont le client a été interrogé par les procureurs, m’a dit : « Je ne pense pas que quelqu’un puisse être un délinquant sexuel récurrent dans une grande organisation sans avoir des complices comme Shine ».

En 2011, la Fox a versé 3,15 millions de dollars à une journaliste du nom de Laurie Luhn pour qu’elle garde le silence sur deux décennies de sévices sexuels perpétrés par Ailes. Une copie de l’accord de confidentialité montre que Shine l’a cosigné. Le jour où Ailes a quitté la Fox, Luhn est sortie de son silence. Elle a déclaré avoir assouvi les besoins sexuels d’Ailes pendant des années, en partie parce qu’il l’avait fait chanter avec des vidéos compromettantes.

Selon la plainte des actionnaires, Ailes a été encouragé par « l’implication directe de Shine », qui programmait les rencontres comme des réunions de travail. Après que Luhn ait souffert d’une "dépression", Shine a fait appel à un psychiatre. Selon Luhn, pendant cette période de détresse, les adjoints de Ailes l’ont installée dans un hôtel de New York ; Luhn a déclaré qu’elle était tenue de transmettre tous ses courriels à Shine, pour qu’il les contrôle.

Un porte-parole de Shine a démenti ce témoignage et a déclaré que Shine n’était pas au courant de la relation sexuelle entre Ailes et Luhn. L’ancien cadre de la Fox a des doutes à ce sujet, et se souvient que Shine a levé les yeux au ciel en disant : « Laurie Luhn, cette fille est un problème ».

Sous la direction de Shine, Fox News a connu des difficultés. En janvier 2017, NBC a débauché Megyn Kelly. (Elle a depuis quitté NBC.) Trois mois plus tard, le Times a révélé que 21st Century Fox et Bill O’Reilly avaient versé un total de treize millions de dollars à cinq employées qui l’avaient accusé de harcèlement sexuel ou de comportement inapproprié.

À l’époque, Bill O’Reilly négociait un versement de trente-deux millions de dollars à une sixième accusatrice. (Il a rejeté toutes les accusations en les qualifiant de "conneries".) La nouvelle a déclenché des boycotts de la part des annonceurs et des manifestations de rue, et Fox a licencié O’Reilly. Shine l’a rapidement suivi vers la sortie.

Hannity avait prévenu que ce serait tout simplement "la fin absolue" de Fox News si son ami Shine était évincé. Mais, une fois O’Reilly et Kelly partis, Hannity se trouvait dans la position la plus forte qu’il ait jamais eue : il était désormais la star la mieux cotée de Fox, et le meilleur défenseur de Trump. Il avait pris le créneau de 21 heures de Kelly et obtenait des taux d’audience encore plus élevés - environ trois millions de téléspectateurs par soir.

Deux mois après que Shine ait quitté la Fox, Hannity est devenu un entremetteur, organisant un dîner avec le Président à la Maison Blanche, auquel assistaient lui-même, Shine et Scaramucci, à l’époque directeur de la communication de Trump. Hannity a proposé à Shine de devenir un haut responsable de la communication, voire un chef de cabinet adjoint. Un an plus tard, Shine occupait les deux postes.

Avant que Trump ne soit élu, Murdoch avait habilement amélioré ses liens avec lui. À l’été 2016, lui et sa quatrième épouse, Jerry Hall, ont rejoint Trump pour un séjour au club de golf de ce dernier en Écosse. Murdoch semble avoir été bien avisé en veillant à un rapprochement. Les télécommunications sont un secteur très réglementé, et sous Trump, le gouvernement a constamment favorisé les intérêts commerciaux de Murdoch, au détriment de ses rivaux.

Hundt, l’ancien président du F.C.C., m’a confié que « trois mesures ont été prises dans le monde réglementaire et de l’antitrust » concernant les télécommunications « mesures extrêmement inhabituelles, et la seule façon de les expliquer est qu’elles sont pro-Fox, pro-Fox et pro-Fox ».

En juin dernier, après seulement six mois de délibérations, l’administration Trump a approuvé l’offre de Fox de vendre la plupart de ses actifs de divertissement à Disney, pour un montant de soixante et onze milliards de dollars. La famille Murdoch recevra plus de deux milliards de dollars dans le cadre de cette transaction et deviendra un actionnaire majeur de la société fusionnée.

Le ministère de la justice n’a exprimé aucune réserve sérieuse en matière d’antitrust, même si l’entreprise combinée allait représenter la moitié des recettes du box-office américain. Trump a publiquement félicité Murdoch avant même que le ministère de la justice ne signe l’accord, et a affirmé que cela serait une source de création d’emplois. En réalité, la consolidation devrait entraîner des milliers de licenciements.

En juillet, la F.C.C. a empêché Sinclair Broadcast Group, un rival conservateur de Fox, de s’associer à Tribune Media Company. La F.C.C. a fait valoir que l’opération violerait les limites imposées quant au nombre de stations de télévision qu’une entité peut posséder, réduisant à néant l’espoir de Sinclair de devenir la prochaine Fox.

Le ministère de la Justice, quant à lui, a saisi le tribunal pour tenter d’empêcher l’acquisition de Time Warner par A. T. & T., qui possède également CNN. Time Warner a considéré l’opération comme essentielle à sa survie à une époque où le secteur des médias est de plus en plus dominé par des concurrents géants tels que Google et Facebook. Murdoch a compris cet impératif : en 2014, 21st Century Fox avait tenté, sans succès, de racheter Time Warner.

Pour lui, s’opposer à l’accord entre ses rivaux était une question de sagacité commerciale. Trump s’est également opposé à l’accord, mais beaucoup de gens ont pensé que son objection était une simple histoire de représailles mesquines contre CNN. Bien que les présidents aient traditionnellement évité d’exprimer leur opinion sur les affaires juridiques en instance devant le pouvoir judiciaire, Trump a carrément critiqué le projet.

Le lendemain de la plainte déposée par le ministère de la justice pour y mettre fin, il a déclaré que la fusion proposée n’était « pas bonne pour le pays ». Trump a également affirmé qu’il n’allait « pas s’impliquer », et le ministère de la Justice a assuré à plusieurs reprises au public qu’il ne l’avait pas fait.

Cependant, à la fin de l’été 2017, quelques mois avant que le ministère de la Justice n’engage une procédure, Trump a enjoint Gary Cohn, alors directeur du Conseil économique national, de faire pression sur le ministère de la Justice pour qu’il intervienne.

Selon une source bien informée, Trump a convoqué Cohn dans le bureau ovale en même temps que John Kelly, qui était tout juste devenu chef de cabinet, et a déclaré, exaspéré, à Kelly : « J’ai dit à Cohn de faire en sorte que cette action en justice soit engagée et rien ne s’est passé ! Je l’ai mentionné cinquante fois. Et rien ne s’est passé. Je veux m’assurer qu’elle soit déposée. Je veux vraiment que cet accord soit bloqué ! »

Cohn, ancien président de Goldman Sachs, a manifestement compris qu’il serait tout à fait malvenu qu’un président utilise le ministère de la Justice pour saper deux des entreprises les plus puissantes du pays en guise de punition pour une couverture médiatique défavorable, ainsi que pour récompenser un organe de presse concurrent qui l’avait soutenu. Selon la source, en sortant de la réunion, Cohn a dit à Kelly : « Ne t’avise pas d’appeler le ministère de la Justice. Nous n’allons pas fonctionner de cette façon là ».

Un porte-parole de Cohn a refusé de commenter, et Kelly n’a pas répondu aux demandes de précisions du New Yorker, mais un ancien cadre de la Maison-Blanche a confirmé que Trump a souvent manifesté sa « frustration » quant à sa volonté de bloquer la fusion A. T. & T. -Time Warner. « Le président ne saisit pas les nuances de la législation ou de la politique antitrust », affirme l’ancien fonctionnaire. « Mais il voulait que le marteau de la fusion tombe ». (Le mois dernier, un tribunal fédéral s’est prononcé en défaveur de la décision du ministère de la Justice).

Les responsables de l’administration Trump affirment que ce ne sont pas des considérations politiques qui ont guidé les actions du gouvernement concernant les trois transactions. Blair Levin, l’ancien fonctionnaire du F.C.C., m’a dit : « Il se peut qu’il y ait des explications tout à fait banales. » Mais, ajoute-t-il, « De façon célébrissime, Trump a dit que vous alliez en avoir marre de gagner, et ce n’est peut-être pas vrai pour le reste de l’Amérique, mais c’est certainement vrai pour Murdoch. »

Il ajoute à propos de Murdoch : « C’est un joueur politique incroyablement retors. Il ne laisse pas d’empreintes digitales. Il est dans le jeu des influences sur les actions gouvernementales et ce à son avantage depuis bien plus longtemps que la plupart d’entre nous n’avons été en vie ».

David Axelrod, qui a été le stratège en chef de Barack Obama, estime que Murdoch a longtemps placé ses intérêts financiers au-dessus de toute préoccupation politique. Il se souvient avoir assisté à un dîner au cours duquel Murdoch l’a pressé de faire avancer la réforme de l’immigration. Axelrod a laissé entendre qu’il serait judicieux que Fox cesse d’attiser l’hystérie nationaliste anti-immigrés, et il raconte que Murdoch a répondu :« C’est à Roger qu’il faudra en parler », comme s’il n’avait aucune influence sur Fox.

Axelrod précise : « Il y a probablement beaucoup de facettes du Trumpisme qui le mettent mal à l’aise. Mais en fin de compte, c’est un homme d’affaires. Et il est bien utile d’avoir pour ami le président, surtout si les liens avec les régulateurs sont étroits, et dans ce cas précis, c’est un président qui ne se laisse pas impressionner par les règles et les normes ».

Récemment, lors d’un dîner avec des journalistes, la très sulfureuse chroniqueuse d’extrême droite Ann Coulter, qui s’est écharpée avec Trump au sujet de sa politique d’immigration, a déclaré que le président lui avait confié que « Murdoch m’appelle tous les jours. » Elle a rappelé que, « à l’époque où Trump me parlait encore », elle s’était plainte auprès de lui que Fox ne l’invitait plus à intervenir.

Elle a déclaré que Trump lui avait lancé : « Voulez-vous que j’appelle Murdoch et que je lui dise de vous faire participer ? ». Coulter a accepté l’offre de Trump. Il se peut qu’il ait appelé Hannity, et non Murdoch, dit-elle, mais dans tous les cas, « dans les douze heures qui ont suivi », elle était réinvitée sur Fox.

Au fur et à mesure que les relations de Murdoch avec la Maison Blanche se réchauffaient, il en allait de même pour la couverture de Trump par Fox. Pendant les années Obama, les attaques de Fox contre le président pouvaient être perçues comme reflétant le rôle contestataire traditionnellement joué par la presse. Avec l’élection de Trump, les animateurs de la chaîne sont passés de la remise en question du pouvoir à la défense de celui-ci.

Yochai Benkler, professeur à la faculté de droit de Harvard qui co-dirige le Berkman Klein Center for Internet & Society, affirme que « le rôle le plus important de Fox depuis l’élection a été de garder les partisans de Trump dans le rang. »

La chaîne a fourni un contre-récit permanent dans lequel : la seule collusion existante est celle entre Hillary Clinton et la Russie ; Robert Mueller, le procureur spécial, est en train de perpétrer un "coup d’État" de l’"État profond" ; Trump et ses acolytes ne sont pas corrompus, mais les forces de l’ordre et les tribunaux américains le sont ; l’immigration illégale n’a pas été aussi élevée depuis quinze ans, c’est une "invasion" ; et les organismes d’information qui présentent des points de vue différents sont des "ennemis du peuple".

Le constat de Benkler s’appuie sur une analyse de millions d’articles de presse américains que lui et deux co-auteurs, Robert Faris et Hal Roberts, ont réalisée pour leur livre de 2018, "Network Propaganda : Manipulation, désinformation et radicalisation dans la politique américaine."

Benkler m’a dit que lui et ses co-auteurs s’étaient attendus à trouver une "polarisation symétrique" dans les médias de gauche et de droite. Au lieu de cela, ils ont découvert que les deux pôles de l’écosystème médiatique américain fonctionnent très différemment. « Ce n’est pas la droite contre la gauche, dit Benkler. C’est la droite contre le reste ».

La majorité des organes de presse américains essaient de s’en tenir aux faits. Lorsqu’un article s’avère erroné, ils publient des corrections ou, comme l’écrivent Benkler et ses co-auteurs, « ils se corrigent mutuellement ». Les sites Web d’extrême-gauche publient autant d’histoires fausses que ceux d’extrême-droite, mais les organismes de presse traditionnels et libéraux tendent à passer sous silence les informations d’un extrémisme inquiétant.

Les médias conservateurs, en revanche, s’attachent davantage à conforter les partis pris de leur public et sont beaucoup plus susceptibles de pratiquer la désinformation, la propagande et la falsification pure et simple (selon des organismes neutres de vérification des faits tels que PolitiFact).

Les études de cas menées par les auteurs montrent que les mensonges et les distorsions de la droite se transmettent facilement depuis les sites Web extrémistes jusqu’aux médias de masse tels que Fox, et que ce n’est qu’occasionnellement qu’ils sont corrigés.

Lorsque des contre-vérités sont révélées, les téléspectateurs du noyau dur réagissent souvent avec colère. Selon Media Matters, les animateurs de Fox ont utilisé le mot "invasion" trente-trois fois dans les trente jours qui ont précédé les élections de mi-mandat.

Après que Shepard Smith, le présentateur de Fox News, a contredit les propos alarmistes de Trump sur les immigrants en déclarant : « Il n’y a pas d’invasion, personne ne vient vous choper », les téléspectateurs se sont déchaînés contre lui sur les réseaux sociaux.

Cheveux perdus (Illustration : The New Yorker)

Il arrive qu’un tel repoussoir ait un effet salutaire. Récemment, Chris Wallace a dit à Sarah Sanders que son affirmation selon laquelle « près de quatre mille terroristes connus ou présumés entrent illégalement dans notre pays » chaque année était tout à fait inexacte. Prouvant l’influence de Fox, la Maison Blanche a abandonné ce point de discussion.

De telles transgressions du récit de Trump sur Fox sont cependant rares. Contrairement à Glenn Beck, Hannity a pu cracher des théories du complot sans fondement en toute impunité. Pendant plus d’un an, Hannity et d’autres animateurs ont répandu le mensonge selon lequel le piratage des e-mails du parti démocrate pendant la campagne 2016 était un travail de l’intérieur.

Hannity a prétendu que le piratage avait été commis non pas par des agents de cyber-guerre russes, comme l’a conclu la communauté du renseignement américain, mais par un membre du personnel démocrate nommé Seth Rich, qui avait été assassiné par des agresseurs inconnus dans une rue de Washington.

Benkler et ses co-auteurs se sont penchés sur la couverture de Fox et ont constaté que non seulement la chaîne a donné au mensonge autour de Seth Rich une tribune nationale, mais qu’elle a également utilisé l’histoire de la conspiration comme une diversion, la déployant comme un récit concurrent lorsque les avancées de l’enquête de Mueller montraient Trump sous un mauvais jour.

En 2017, après que les parents de Seth Rich ont exigé des excuses et que les annonceurs ont commencé à fuir la chaîne, Fox en est arrivée à publier une rétractation, et Hannity a abandonné l’histoire. Entre-temps, les animateurs de Fox avaient commencé à mettre en avant une autre conspiration : l’histoire d’" Uranium One ", que Hannity a qualifiée de « plus grand scandale de tous les temps impliquant la Russie ».

Lors d’une émission diffusée en octobre 2017, Hannity a affirmé que Hillary Clinton, lorsqu’elle était secrétaire d’État, avait donné « à Vladimir Poutine et à la Russie vingt pour cent de l’uranium américain, qui est le matériau de base pour fabriquer des armes nucléaires. » Visiblement, il s’agissait d’un accord conclu en échange de gigantesques versements à la Fondation Clinton.

Hannity a également affirmé que « les grands médias corrompus et menteurs » avaient caché cette "bombe" aux Américains, car ils étaient "complices" d’une « énorme opération de dissimulation ». Plus d’un an auparavant, le Times avait publié en première page un article sur l’affaire, basé sur le livre de droite "Clinton Cash".

Mais l’histoire était tombée dans l’oubli, car d’autres reportages en avaient montré les failles, révélant que de multiples agences gouvernementales avaient approuvé l’accord et que la quantité d’uranium concernée était insignifiante. Pourtant, Fox a continué à en faire un véritable scandale de sécurité nationale impliquant la Russie. Sur le plateau de "Hannity", l’ancien conseiller de Trump à la Maison Blanche, Sebastian Gorka, a soutenu que le crime des Clinton était équivalent à la trahison de Julius et Ethel Rosenberg pendant la guerre froide - et a rappelé aux téléspectateurs que les Rosenberg avaient été exécutés.

Dans les deux jours qui ont suivi, Trump a repris l’histoire de Fox, en tweetant : « L’accord sur l’uranium avec la Russie, conclu avec l’aide des Clinton et au su de l’administration Obama, est la plus grande histoire que les Fake Media ne veulent pas reprendre ! »

Alisyn Camerota a été co-animatrice de "Fox & Friends" pendant des années avant de rejoindre CNN, en 2014. Selon elle, Fox a des journalistes d’information sérieux, mais elle a été si perturbée par l’absence de rigueur sur "Fox & Friends" qu’elle a écrit un livre à peine romancé, "Amanda Wakes Up", sur le flou des lignes journalistiques au sein d’une émission matinale du câble.

« Fox & Friends était une émission amusante, mais ce n’était pas une émission d’information, dit-elle. Elle enfreignait régulièrement les règles du journalisme. C’était en fait le quotidien de Roger à la télévision. Il se réveillait le matin avec une marotte quelconque, la balançait à Bill Shine, et ce dernier nous disait de la diffuser à la télévision. »

Elle affirme que les producteurs de l’émission « épluchaient les sites Web d’extrême droite et de fêlés » pour trouver du contenu, et ajoute : « Je n’ai jamais entendu quelqu’un s’inquiéter de la nécessité de rechercher une autre source. La seule phrase que j’ai entendue à maintes reprises était : "Cela va scandaliser le public". Il faut enflammer les téléspectateurs pour que personne ne se désintéresse de vous. Telles étaient les normes ».

Au grand étonnement de ses collègues, la co-animatrice de Fox Kimberly Guilfoyle se préparait souvent pour "The Five" en s’appuyant sur les informations que lui fournissait un fan inconditionnel : un téléspectateur de Géorgie nommé David Townsend, qui n’avait aucun lien avec Fox News pas plus qu’avec le journalisme.

Elle communiquait à Townsend les sujets prévus pour la journée, puis ce dernier lui envoyait par e-mail des suggestions de contenu. Un ancien collègue de Guilfoyle raconte : « C’était une blague entre assistants de production - ils disaient : « Attendez d’entendre ça ! » En fait, il lui fournissait des analyses ! C’était à mourir de rire ».

Townsend contribue activement au site de médias sociaux marginal Gab [Gab est un service de réseautage social en ligne basé à Austin, au Texas, créé pour servir d’alternative aux réseaux sociaux comme Facebook, Twitter et Reddit. Il s’agit d’un fork du logiciel libre Mastodon,Ndt], que Wired a qualifié de " havre de l’extrême droite ". (Il a défendu l’idée que les "hommes physiquement fragiles" sont "plus susceptibles d’être socialistes" et a affirmé que de faire remarquer que "les magnats les plus puissants de la politique américaine sont des sionistes" n’était pas antisémite).

La société de serveurs qui héberge Gab l’a temporairement exclus de l’Internet après avoir démontré qu’il avait relayé les propos haineux de Robert Bowers, le tireur qui a tué onze personnes dans une synagogue de Pittsburgh, en octobre dernier.

Quand j’ai interrogé Townsend au sujet de ses e-mails à Guilfoyle, il a répondu : « Mêlez-vous de vos affaires. Je suis juste un fan de la Fox. Je suis un guerrier du clavier. Je ne suis pas important. Il a ajouté : J’ai envoyé des trucs à diverses personnes de la Fox pendant des années, et je ne reçois pas un centime pour ça » puis il a conclu : « Je ne sais pas sur quelle tête vous allez chercher des poux, mais vous feriez mieux de faire attention. »

Étant donné le statut de Fox en tant que source d’information privilégiée de Trump, d’aucuns soutiennent que la chaîne devrait être particulièrement vigilante quant aux influences extérieures. Aki Peritz, ancien analyste de la C.I.A. et professeur adjoint à l’American University, a écrit que Fox News est devenue une cible alléchante pour les agences d’espionnage étrangères, dans la mesure où « c’est ce que voit le président ».

Mais une source qui m’a parlé de Guilfoyle et Townsend estime : « C’est encore pire qu’une conspiration du dark Web, ou que quelque chose qui essayerait de manipuler Fox. C’était juste un gars en sous-vêtements en Géorgie qui avait de l’influence sur Fox News ! Et Fox News influence le Président ! »

Officiellement, une journée type de Trump commence à 11 heures, avec son briefing sur la sécurité nationale. Mais Matt Gertz, membre senior de Media Matters, qui a passé plus d’un an à suivre de près la concordance entre les tweets de Trump et les informations données par Fox News, m’a expliqué que « le vrai briefing a lieu sur "Fox & Friends", quatre heures plus tôt ».

À en juger par le timing des tweets de Trump, Gertz pense que le président enregistre "Fox & Friends" et le visionne depuis le début, souvent avec un léger retard. Pendant que Trump regarde, il tweete fréquemment sur des points avec lesquels il est d’accord.

Depuis août 2018, Media Matters a recensé plus de deux cents cas où Trump a diffusé des articles de Fox News à ses cinquante-huit millions de followers sur Twitter. « Trump sert de bonimenteur pour Fox », affirme Levin, offrant ainsi à la chaîne une aide promotionnelle inestimable.

Les animateurs de Fox opèrent parfois un revirement d’opinion afin de suivre la ligne de Trump : Hannity, qui, sous l’ère Obama, qualifiait les négociations avec la Corée du Nord d’"inquiétantes", considère désormais ces efforts comme une "énorme victoire en matière de politique étrangère". Mais Gertz en est venu à croire que Fox dirige Trump plus que Trump ne dirige Fox.

Lors de la récente impasse avec le Congrès concernant le financement d’un mur à la frontière, les présentateurs et les invités de Fox ont à plusieurs reprises poussé Trump à rejeter les compromis préconisés par les républicains du Congrès et par sa propre équipe, et à poursuivre à la place une voie extrême plébiscitée par les téléspectateurs fidèles de Fox.

Des assistants à la Maison Blanche confirment qu’à plusieurs reprises, Trump a écarté des compromis au dernier moment parce que des animateurs et des invités de Fox y étaient opposés. En mars dernier, il était largement attendu que Trump signe un projet de loi omnibus [Un projet de loi omnibus de dépenses est un type de projet de loi aux États-Unis qui regroupe plusieurs des petits projets de loi de crédits ordinaires en un seul projet de loi plus grand qui peut être adopté avec un seul vote par chambre, NdT], évitant ainsi un shutdown du gouvernement.

Mick Mulvaney, son directeur du budget à l’époque, et le vice-président Mike Pence l’avaient qualifié d’accord conclu. Mais le 22 mars, Trump est devenu nerveux, m’a dit un ancien conseiller principal, lorsque les animateurs du soir de Fox l’ont "allumé" et le lendemain matin, sur "Fox & Friends", l’un des plus fidèles partisans du président, Pete Hegseth, l’a "déchiré".

À 8 h 55, Trump a tweeté qu’il pourrait opposer son veto au projet de loi, car il n’y avait pas de financement pour le "MUR DE LA FRONTIÉRE". L’ancien conseiller principal a déclaré à propos du revirement soudain de Trump : " Tout vient de Fox. "

Le tweet de Trump a semé la panique à Washington : de nombreux membres du Congrès avaient quitté la ville et il n’était pas certain qu’ils soient assez nombreux pour adopter un projet de loi de finances provisoire.

Le secrétaire à la Défense James Mattis s’est précipité à la Maison Blanche et a expliqué à Trump que, s’il mettait son veto au projet de loi, le financement des troupes américaines serait interrompu à minuit. Cet après-midi-là, Trump a cédé et a signé le projet de loi.

Dans ce cas précis, Mattis l’a emporté, mais d’anciens collaborateurs de la Maison Blanche et d’autres acteurs politiques de Washington estiment que Trump est plus influencé par les experts et les invités de Fox que par son équipe ou par les experts du renseignement qui le conseillent.

Marc Short, qui était auparavant chargé des relations avec le Congrès pour la Maison Blanche, a tenté de contrer cet effet en enrôlant des alliés républicains de la Chambre pour aller sur Fox. Selon un membre du personnel du Sénat, un sénateur républicain très en vue affirme que sa méthode préférée pour se faire entendre du Président est d’aller sur Fox.

Il appelle un animateur sympathique et lui propose de passer à l’antenne ; généralement, avant même qu’il se soit démaquillé dans le salon vert [Le Salon vert est une pièce, située en coulisses, non loin de la scène et des loges, où les comédiens peuvent se reposer, prendre un café et discuter entre eux,NdT], Trump l’appelle. "C’est le moyen idéal pour entrer dans sa tête", affirme l’employé du Sénat.

"On dirait bien qu’on assiste à l’avant-première du divorce des Huffman." Illustration : The New Yorker

Gertz n’est pas le seul à penser que les animateurs de Fox ont joué un rôle clé dans le récent shutdown du gouvernement par Trump et dans sa déclaration d’urgence nationale à la frontière sud. Tous les soirs Hannity et Dobbs ont exhorté Trump dans leurs émissions à prendre ces mesures ; selon des rapports de presse, ils sont également intervenus personnellement pour conseiller à Trump de le faire.

Le 19 décembre, alors que les Républicains contrôlaient toujours les deux chambres du Congrès, le cabinet de Trump a indiqué qu’il signerait un projet de loi de dépenses prévoyant 1,6 milliard de dollars pour la sécurité des frontières. Cette nuit-là, Ann Coulter et Rush Limbaugh ont dénoncé l’accord, et le lendemain matin, Fox a pilonné Trump.

Le représentant Mark Meadows, de Caroline du Nord, membre du Freedom Caucus d’extrême droite, est apparu sur "Fox & Friends", qualifiant le projet de loi non pas de " gifle " mais d’" entourloupe ", et avertissant Trump de ne pas " céder ". À 7 h 33, Hegseth a tweeté à l’intention de Trump : « N’écoutez pas les conseillers qui vous incitent à vous écraser .... . Pas de MUR = FERMEZ LA. »

Le lendemain, Trump a refusé de signer le projet de loi sur les dépenses, ce qui a entraîné le blocage d’une grande partie du gouvernement. Pendant les trente-cinq jours qui ont suivi, Hannity et les autres animateurs de Fox ont continué à soutenir Trump, même si les sondages montraient que le public américain était de plus en plus opposé au shutdown.

Oliver Darcy, de CNN, déclare que les démocrates, plutôt que de négocier avec Trump, « pourraient aussi bien appeler Sean Hannity et l’avoir au téléphone, ajoutant : Il semble que nous ayons en quelque sorte élu Sean Hannity lorsque nous avons élu Trump. »

Gertz, de Media Matters, soutient que « la vision du monde du président est très précisément formatée par ce qu’il voit sur Fox News, mais les objectifs de Fox sont l’audience et l’argent, ce qu’ils obtiennent en maximisant la rancœur. Ce n’est pas un message qui va être bénéfique pour le reste du pays ».

Blair Levin, l’ancien responsable du F.C.C., affirme que Trump et Fox emploient le même schéma risqué : enflammer la base et accroître son soutien, plutôt que de construire une coalition plus large. Le dogmatisme ciblé peut générer des milliards de dollars pour une chaîne câblée, mais en tant que stratégie de gouvernement, il aliène inévitablement la majorité. Le problème pour Trump, comme le dit un ancien animateur de Fox, est qu’ « il ne peut pas se permettre de perdre Fox, car c’est tout ce qu’il a ».

De même, Fox a un intérêt financier à faire en sorte que Trump soit présenté sous un jour favorable. Les taux d’audience de la Fox et de MSNBC chutent lorsque les nouvelles sont mauvaises pour le parti de leur auditoire. Van Susteren compare ce phénomène au fait que les spectateurs se détournent de leur équipe sportive lorsqu’elle perd.

Pendant la gestion désastreuse de l’ouragan Katrina par l’administration Bush, l’audience de Fox a tellement chuté, m’a dit un ancien producteur de Fox, qu’on lui a demandé de ne plus couvrir l’événement.

Depuis les élections de mi-mandat, au cours desquelles les Républicains ont perdu la Chambre des représentants, les taux d’audience de Nielsen pour les émissions du soir de Fox - Hannity, Tucker Carlson et Laura Ingraham - ont chuté de 20 %.

Peu de choses font monter l’audimat en flèche comme une interview présidentielle en exclusivité, et le 28 février, Hannity en a de nouveau décroché une, lors de la rencontre du président avec Kim Jong Un à Hanoi.

À un moment précis pendant l’entretien, Hannity a abordé la nouvelle la plus importante de la semaine - le témoignage de Michael Cohen devant le Congrès - et a garanti aux téléspectateurs que, même si Stormy Daniels avait été soudoyée avant l’élection de 2016, le président était innocent de tout acte criminel.

Cohen, a-t-il dit à Trump, « m’a dit au moins une douzaine de fois que c’est lui qui avait pris la décision de verser ces sommes, et qu’il ne vous en avait rien dit. » « Exact » a répondu Trump.

Lorsque Hannity a déploré que les auditions de Cohen aient perturbé les efforts diplomatiques de Trump, en entonnant : « Je pensais que la politique en Amérique s’arrêtait aux rives de la mer », Trump a qualifié le timing de « vraiment inapproprié. »

À la Maison-Blanche, Bill Shine, tout comme il le faisait à Fox, s’en remet à celui qu’il appelle "le patron". Lorsque Trump a manifesté son agacement à l’égard des journalistes de la Maison-Blanche, Bill Shine s’est comporté comme son homme de main.

Au mépris des principes protégeant la liberté de la presse, il a tenté de confisquer l’accréditation à la maison blanche de l’offensif correspondant de CNN Jim Acosta ; il a également tenté de " dés-inviter " la correspondante de CNN Kaitlan Collins qui couvrait un événement au Rose Garden. Elle avait agacé le président plus tôt dans la journée en posant une question sur Michael Cohen.

Shine a également rabroué Peter Baker, le correspondant en chef du Times à la Maison Blanche, après avoir entendu - de manière inexacte - que Baker, lors d’un sommet à Buenos Aires, avait ri lorsque le Premier ministre japonais, Shinzō Abe, avait félicité Trump pour sa "victoire historique" aux élections de mi-mandat.

Baker a refusé de commenter, mais un de ses collègues a vu Shine écarter Baker du groupe de presse. Shine lui a pointé un doigt en pleine figure et a exigé de savoir s’il s’était moqué de Trump. L’incident a été réglé à l’amiable après que Baker a envoyé à Shine un enregistrement audio prouvant que l’accusation était fausse. Mais la tentative de Shine pour contrôler un journaliste chevronné n’est pas sans rappeler la culture de l’intimidation qui règne à Fox News.

Une source proche de Trump affirme que le président s’est plaint du manque d’agressivité de Shine. À la fin de l’année dernière, Trump a déclaré à cette source : « Shine m’a promis que ma couverture médiatique s’améliorerait, mais elle a encore empiré. » Selon la source, « Trump pensait obtenir Roger Ailes, mais au lieu de cela, il a obtenu le valet de pied de Roger Ailes. »

Au cours des derniers mois, Shine a pratiquement mis fin aux points presse de la Maison Blanche. Trump préfère être son propre porte-parole. « Il a toujours pensé que c’était lui qui était le meilleur, dit un ancien haut fonctionnaire de la Maison Blanche. Mais le problème est que vous perdez la possibilité de démentir. C’est devenu un numéro de trapèze sans filet, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. La communication sur le shutdown était une catastrophe. Il n’y avait aucune stratégie de sortie ».

Alors que Trump condamne les journalistes en les qualifiant d’"ennemis du peuple", Fox News a également pris des mesures de répression contre les voix dissidentes. Van Susteren a été remplacée par Tucker Carlson, et sous la direction de l’actuelle directrice générale de Fox, Suzanne Scott, une adjointe de longue date de Shine, le programme des heures de grande écoute est devenu plus partial que jamais.

La Fox est devenue le refuge de Trump dans les moments de stress. Lorsqu’il s’est retrouvé seul à la Maison Blanche le soir du Nouvel An, il a appelé en direct l’émission de Pete Hegseth pour lui souhaiter une bonne année. Quelques semaines plus tard, lorsque Trump a été humilié par la décision du FBI d’ouvrir une enquête de contre-espionnage à son encontre, il a appelé l’animatrice de Fox Jeanine Pirro pour être rassuré à l’antenne.

Les détracteurs conservateurs de Trump qui avaient l’habitude d’apparaître sur Fox, comme Stephen Hayes et George Will, ont quasiment disparu ; Will a déclaré au Washington Post que Fox avait mis fin à son contrat, en 2017, sans explication. Il est presque choquant de rappeler que, pas plus tard qu’en 2009, Fox compensait la présence de Hannity par celle d’un co-animateur libéral, Alan Colmes.

Simon Rosenberg, un vétéran démocrate de la campagne de Bill Clinton en 1992, est passé régulièrement sur Fox pendant plus de dix ans. En novembre 2017, il a eu un vif échange à l’antenne avec une animatrice de Fox, Melissa Francis, au sujet de la loi fiscale républicaine. Lorsque celle-ci l’a tancé, l’accusant de se contenter de répéter des éléments de discussion, il a juré à l’antenne de ne jamais revenir. « Il a toujours été clair qu’il ne s’agissait pas d’une agence de presse comme les autres, m’a dit Rosenberg.

Mais quand Ailes est parti, et que Trump a été élu, la chaîne a changé. Ils sont devenus plus combatifs, et ont commencé à me traiter comme un ennemi, pas comme un adversaire. » Maintenant que Shine a rejoint Trump à la Maison Blanche, dit-il, « c’est comme si les animateurs de Fox avaient maintenant deux patrons - la Maison Blanche et le public. » Selon lui, la chaîne s’est tellement rapproché de la Maison Blanche dans la diabolisation des détracteurs de Trump que « Fox n’est plus conservatrice, elle est anti-démocratique ».

Une fois que la Fox aura cédé ses actifs de divertissement à Disney, la chaîne d’information fera partie d’une société beaucoup plus modeste, placée sous la supervision quotidienne de Lachlan Murdoch. Comme Rupert, Lachlan est un conservateur, mais selon les rumeurs au sein de Fox, il semblerait qu’il veuille rapprocher la chaîne d’information du centre-droit.

A ce jour, le plus grand défi pour les normes journalistiques de Fox est l’épreuve de force imminente concernant les conclusions de Mueller. Depuis deux ans, la chaîne prépare ses téléspectateurs à réagir avec une extraordinaire fureur si l’étau des forces de l’ordre du pays devait se resserrer autour du Président.

Selon Media Matters, au cours de la première année qui a suivi la nomination de Mueller, Hannity a diffusé à lui seul quatre cent quatre-vingt-six émissions attaquant l’enquête criminelle fédérale sur l’ingérence russe dans l’élection de 2016 ; trente-huit pour cent de ces émissions affirmaient que les forces de l’ordre avaient enfreint la loi.

Ces dernières semaines, Hannity a parlé d’un " coup d’État ", et un invité de l’émission de Laura Ingraham, l’avocat Joseph diGenova, a déclaré : « Ce sera une guerre totale. Et, comme je le dis à mes amis, je vais faire deux choses : voter et acheter des armes ».

Jerry Taylor, cofondateur du Niskanen Center, un groupe de réflexion à Washington pour les modérés, déclare : « Dans un monde hypothétique où il n’y aurait plus Fox News, si le président Trump devait être durement mis à mal par le rapport Mueller, ce serait la fin pour lui. Mais, avec Fox News couvrant ses arrières auprès de la base républicaine, il a une chance inespérée, car il dispose de quelque chose qu’aucun autre président dans l’histoire américaine n’a jamais eu à sa disposition - une entreprise de propagande servile. » ♦

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