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D’après Notre Planète Info du 2 Novembre 2021

Le chauffage au bois n’est pas une solution face au changement climatique

Par Bruno Bourgeon

mercredi 24 novembre 2021, par JMT

Le chauffage au bois n’est pas une solution face au changement climatique

Poêle à bois © Christophe Magdelaine / www.notre-planete.info - Licence : Tous droits réservés

Une nouvelle publication de l’European Academies Science Advisory Council (EASAC), une structure européenne collaborative et bénévole d’aide à la décision en matière de science, met en garde contre les prétendus bienfaits environnementaux du chauffage au bois. Ces dernières années, la production mondiale de granulés de bois utilisant la biomasse forestière a augmenté et a atteint 24 millions de tonnes en 2019, soit 50 millions de stères (Outlook for Wood Pellets, 2019).

La majeure partie de la production industrielle de granulés est destinée à la production d’électricité qui est passée de 52146 MW en 2009 à 95687 MW en 2018, les augmentations les plus rapides se produisant (sur la même période) dans l’UE (de 15912 à 24081 MW) et en Asie (de 14140 à 34845 MW), selon l’Agence internationale des énergies renouvelables.

Ce dynamisme s’explique par les règles internationales qui considèrent la biomasse forestière comme renouvelable, bon moyen pour les pays d’atteindre leurs objectifs en matière d’énergie renouvelable. Ainsi l’Union Européenne qui s’est donnée notamment comme objectif de porter la part des énergies renouvelables à au moins 32 % en 2030. Environ la moitié des énergies renouvelables (EnR) de l’Union européenne (UE) provient de la biomasse solide (Berndes et al., 2016 ; Eurostat, 2019).

Si la combustion de biomasse forestière pour l’électricité et la chaleur est un moyen écologique, local et efficace, selon l’EASAC, les granules de bois libèrent plus de carbone que le charbon. « Les granulés de bois ne sont pas une solution miracle pour fournir de l’électricité et de la chaleur sans contribuer au changement climatique. Même si l’UE et de nombreuses politiques nationales encouragent leur utilisation à grande échelle », explique le professeur Lars Walloe, président du programme environnement de l’EASAC qui ajoute : "pour le climat, il n’y a pas d’alternative à l’arrêt immédiat du charbon et d’autres sources d’énergie fossile. Mais nous avons également souligné à plusieurs reprises que, dans de nombreux cas, la substitution à grande échelle du charbon par la biomasse forestière accélérera le réchauffement climatique et augmentera les risques de dépassement des objectifs de Paris".

La raison est simple :lorsque la forêt est récoltée et utilisée pour la bioénergie, tout le carbone de la biomasse pénètre très rapidement dans l’atmosphère, mais il ne sera pas réabsorbé par de nouveaux arbres avant des décennies. Cela n’est pas compatible avec la nécessité de s’attaquer d’urgence à la crise climatique », a déclaré Michael Norton, directeur du programme environnement de l’EASAC.

Dans le cadre de l’urgence climatique, on ne peut plus considérer que l’exploitation des arbres pour les brûler reste neutre en bilan carbone. Or, ce sont les règles de comptabilisation décrétées par les Nations Unies et qui sont ensuite transposées par les Etats. Ainsi, conformément aux règles de l’ONU, la directive de l’UE sur les énergies renouvelables révisée fin 2018 et le système d’échange de quotas d’émission (ETS) de l’UE évaluent à zéro les émissions de carbone de toute utilisation de la biomasse. « Cela donne une impression trompeuse aux consommateurs d’énergie et aux décideurs politiques, et ces échappatoires doivent être rapidement supprimées », ajoute Michael Norton.

Il continue : « Le concept de neutralité carbone de la biomasse forestière avait peut-être une certaine validité en 2009 lorsque l’urgence de lutter contre le réchauffement climatique était moins largement reconnue et l’idée était simplement que la croissance de la biomasse élimine autant de CO2 de l’atmosphère que celui émis par sa combustion. Mais l’accent est mis aujourd’hui sur la limitation du réchauffement climatique à 1,5 ou 2 ° C. Cela nécessite des actions urgentes, sans attendre la croissance de nouveaux arbres tout en pompant de grandes quantités de carbone dans l’atmosphère en brûlant des arbres pour produire de l’énergie », précise Michael Norton.

Or, les importantes subventions aux EnR mises à disposition dans certains États membres de l’UE ont entraîné une énorme augmentation de l’utilisation de la biomasse forestière - y compris le remplacement du charbon dans les grandes centrales électriques par le bois, par exemple des États-Unis, du Canada et d’autres pays européens. Le processus de récolte des forêts pour produire des granulés de bois a été industrialisé à une échelle de plusieurs millions de tonnes par an et transporté sur des milliers de kilomètres.

L’exploitation des forêts ne semble poser aucun problème : les industriels du bois martèlent que la forêt est bien gérée et les chaudières / poêles à bois se vendent comme des petits pains. Mais une forêt bien gérée ne l’est généralement que dans une approche commerciale : dans ce type d’exploitation forestière,la biodiversité est souvent faible, les machines pour couper et extraire le bois détruisent des milieux qui peuvent être fragiles, les essences plantées n’ont pas forcément d’intérêt écologique, l’absence d’arbres morts appauvrit le milieu et le bilan carbone retrouve sa neutralité après plusieurs dizaines d’années, un laps de temps trop long.

Sur ce point, la bioénergie se heurte au temps de récupération du carbone : temps qu’il faut aux nouveaux arbres en croissance pour réabsorber le carbone libéré lors de la combustion. Loin d’être neutre en carbone, la combustion de la biomasse forestière ajoute en fait du CO2 à l’atmosphère pendant la période de récupération du carbone, qui pour les arbres les plus pertinents se situe entre 50 et 100 ans. Un délai incompatible avec l’urgence climatique qui réclame des mesures immédiates et drastiques. C’est pourquoi, l’EASAC recommande la mise en place d’une période de récupération maximale, compatible avec l’accord de Paris.

L’EASAC note que lors de la conférence de Madrid (COP25) : "nous avons vu des gouvernements nationaux vouloir montrer leur succès. Des règles de comptabilité carbone trompeuses permettent de réduire les émissions nationales sur papier simplement en passant du charbon (où les émissions doivent être déclarées) à la biomasse importée (déclarée comme zéro émission).

« La biomasse forestière pour l’énergie est saluée comme la "solution miracle" proverbiale qui offre un avantage mutuel aux décideurs politiques, aux forestiers et aux sociétés énergétiques, car les règles actuelles lui permettent d’être subventionnée sans discernement en tant qu’énergie renouvelable. Mais pour le climat, c’est comme sauter de la poêle dans le feu », explique le Dr William Gillett, directeur du programme énergétique de l’EASAC.

Si les bûches de bois ou les granulés de bois sont considérés - à tort - comme une source d’énergie renouvelable et neutre en carbone qu’il faut encourager, leur combustion dans de mauvaises conditions peut également constituer une part significative de la pollution aux particules fines. Ainsi, en France, en 2018, le chauffage au bois domestique était responsable de 43 % des émissions nationales en PM 2.5, ainsi que plus de la moitié des très fines émissions en PM 1.0.

Or, plus les particules sont fines, plus elles pénètrent profondément dans l’organisme. Rappelons que le Centre International de la Recherche sur le Cancer a déclaré en 2013 les particules fines comme étant cancérogènes pour l’humain. En France, les particules fines sont responsables d’environ 40 000 décès par an selon Santé Publique France, dont 17 000 pourraient être évités en respectant les valeurs limites recommandées par l’Organisation Mondiale de la Santé.

Bruno Bourgeon http://www.aid97400.re/

D’après Notre Planète Info du 2 Novembre 2021

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