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Suite à un article du Quotidien de La Réunion

Biocarburants, quels intérêts pour l’Humanité ?

Par Bruno Bourgeon

mardi 18 janvier 2022, par JMT

Biocarburants, quels intérêts pour l’Humanité ?

Suite à l’article paru dans le Quotidien du 13/12/2021, il apparaît intéressant de développer et de montrer en quoi la production de biocarburant est intéressante (ou pas !) pour l’Humanité, et la vie sur Terre. Il y a deux filières de production d’agrocarburants :

* La filière biogazole, ou biodiesel (en France : diester), à partir d’huile végétale (palmier à huile, colza, tournesol, ricin, …), qui représente 25% de la production

* La filière bioéthanol (E85), à partir de céréales hydrolysées (maïs, blé, canne à sucre, …), 75% de la production

La troisième génération est constituée des algo-carburants, 30 à 100 fois plus efficace en terme de rendement énergétique que les oléagineux terrestres, sans concurrence foncière avec l’agriculture vivrière, mais très chère à produire (compter 10 € le litre) et qui requiert engrais et chimie. Le carburant de l’avenir ?

La production mondiale est, en 2019, de 4113 PJ (pétajoules), soit environ 100 MTEP (millions de tonnes-équivalent-pétrole). La consommation mondiale en 2011 était de 60 MTEP, soit 3.1% de la consommation routière totale. Les principaux producteurs sont les USA (39% de la production), le Brésil (24%), l’Indonésie (7%).

Les intérêts géo-stratégiques sont :
* De ne pas exclusivement dépendre de pays producteurs de pétrole instables politiquement (Iran, Irak, Nigéria, Venezuela, …)
* De fournir de nouvelles sources de carburants quand la ressource en pétrole est déjà déclinante
* De trouver de nouveaux débouchés agricoles

La limite étant le rendement de la conversion en biomasse de l’énergie solaire par la photosynthèse, qui, si on ne veut pas rajouter de CO2 dans l’atmosphère, ne doit pas dépasser 2%

Si l’on veut remplacer complètement la ressource pétrolière, cela aboutirait à cultiver 20 millions de km2 de sole agricole utile (SAU) pour cette filière, soit deux fois et demi le Brésil. Improbable, pas impossible.

Le coût pour le consommateur ? Cela a été calculé en France : + 3 milliards d’€/an.

La controverse est évidemment de nature écologique :

* Pour maîtriser la production agricole et maintenir des coûts de nourriture les plus bas possibles pour nourrir l’Humanité et les animaux d’élevage, fabriquer du biocarburant en brûlant des denrées alimentaires est un crime contre l’Humanité (Jean Ziegler, ancien rapporteur de l’ONU pour l’alimentation)

* Les terres arables disponibles sont en constante diminution sur notre planète : accroître cette réduction pour produire des biocarburants entraîne inéluctablement une augmentation conséquente de la déforestation, avec ses impacts sur le CO2 dans l’atmosphère et la perte de biodiversité.

* Cas de l’Indonésie : elle présente 60% de la tourbe mondiale (forêts millénaires brûlées), qui en fait le troisième émetteur mondial de carbone dans l’atmosphère après les USA et la Chine.

* En France, les besoins en carburants (50 MTEP annuels) obligeraient à avoir une SAU plus grande que le pays lui-même (calcul de Jean-Marc Jancovici) : cette filière est un élément certes non négligeable de la politique agricole, mais un élément négligeable d’une politique énergétique

* Enfin les hausses des tarifs agricoles entraînés par cette filière favoriseraient l’instabilité politique des pays pauvres : les émeutes de la faim ont déjà commencé dans certains de ces pays.

Et à La Réunion alors ? La SRPP nous dit que les coûts de l’infrastructure pour pouvoir importer de l’E85, ou le produire et le consommer localement, feraient qu’il deviendrait plus cher que d’importer du carburant d’origine fossile. La production locale se ferait aux dépens de la canne, ce qui diminuerait en partie les émissions de CO2 (- 50% par rapport au SP95, et -95% pour les émissions de particules fines). Il faudrait aussi une compatibilité des véhicules : soit véhicule en flex-fuel, soit avec boîtier E85 homologué. Enfin, la SAU réunionnaise est insuffisante pour répondre à la demande locale, les importations se poursuivraient malgré tout.

En conclusion, la filière biocarburants a peut-être un intérêt mineur pour faire avancer nos véhicules, et encore, seulement si nous nous orientons vers une diminution drastique de nos besoins, ou nos avions, mais l’essentiel n’est pas là : les conséquences sur l’enchérissement des denrées vivrières, ou sur la déforestation, seront bien plus incommensurables au regard de la survie sur Terre… Et pas que de l’Humanité.

Bruno Bourgeon http://aid97400.re/
Sources :
* Wikipédia
* Que pouvons nous espérer des biocarburants ?
* Le Quotidien de La Réunion du 13/12/2021

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