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D’après Science & Vie du 13 Octobre 2021

Notre civilisation est-elle sur le point de s’effondrer ?

Par Bruno Bourgeon

samedi 29 janvier 2022, par JMT

Notre civilisation est-elle sur le point de s’effondrer ?

Destruction

Complexe et fragile, notre civilisation engendre des déséquilibres destructeurs. Le débat enfle sur les réseaux sociaux. Réchauffement climatique, épuisement des ressources, instabilités sociales et politiques.... Tout cela finira-t-il par provoquer un écroulement inéluctable de nos sociétés ?

Inutile de se le cacher : tous les indicateurs sont au rouge. Jamais l’Humanité n’avait poussé le système Terre aussi loin dans ses retranchements. Et l’état de tension à l’intérieur de nos sociétés n’est pas plus rassurant. « Les inégalités sociales constituent clairement un des points de bascule de nos sociétés contemporaines », prévient l’anthropologue Sander Van der Leeuw (université de l’Arizona), sachant que notre hyperconnectivité permet ensuite aux crises de se propager à une vitesse inédite.

Qu’est-ce qui nous empêcherait alors de connaître le sort plus ou moins dramatique des sociétés anciennes qui, commeles Mayas se sont désintégrées ? « Nos sociétés modernes sont fondamentalement soumises aux mêmes pressions que les anciennes », observe Dan Hoyer, du Global History Databank Project.

Notre organisation est d’ailleurs parfois étrangement similaire. Les Romains et les Byzantins avaient eux aussi une économie mondialisée. Leurs grands centres de population dépendaient, comme les nôtres, de la production agricole de régions périphériques, plus marginales, tant sur le plan social qu’environnemental, et susceptibles de s’effondrer - il s’agissait du Néguev pour les Byzantins, victime, entre autres du petit âge glaciaire.

Les infrastructures monumentales et les axes de transport de sociétés anciennes rappellent également les nôtres. La complexité du réseau d’eau d’Angkor est comparable à celle de nos réseaux électriques actuels.

Les projections réalisées sur notre société contemporaine n’offrent, de fait, qu’une poignée de décennies de relative stabilité. « Nos simulations montrent que le seuil à partir duquel le niveau de destruction d’écosystèmes provoque la baisse de la population mondiale intervient vers 2080 », prévient Michel Loreau, directeur du Centre de théorie et modélisation de la biodiversité.

Mais le pire est-il sûr ? Les sciences émergentes de la complexité pourraient nous permettre de percevoir à temps les signes annonciateurs d’une catastrophe et de changer des trajectoires néfastes. La communauté scientifique s’y attelle. « Les longues séries de données planétaires qui commencent à s’accumuler sur le climat et les écosystèmes sont précieuses pour détecter les signaux avant-coureurs », avance Stephen Carpenter, écologue à l’université du Wisconsin.

Tout en prenant garde de ne pas chercher à empêcher absolument toutes les fluctuations du système, car une gestion trop rigide crée elle-même de la fragilité, il serait possible d’aller beaucoup plus loin dans la maîtrise de notre destin : un groupe de mathématiciens et d’économistes britanniques a proposé le concept de « points d’intervention sensibles », susceptibles de faire basculer le système du bon côté.

Ces scientifiques évoquent, par exemple, une toute petite action sur les règles de communication financière qui pourrait soudain dissuader les compagnies pétrolières d’investir dans de nouveaux champs d’hydrocarbures ; un léger coup de pouce en faveur de l’éolien et du photovoltaïque qui rendrait leur utilisation incontournable ; une infime intervention qui permettrait de faire basculer l’ensemble de la population vers un mode de vie vertueux pour le climat…

Une expérience publiée en 2018 a établi que la conversion à grande échelle vers une nouvelle norme sociale pouvait intervenir à partir d’un seuil de 25 % de la population déjà convertie. Ces notions de “masse critique” et de “coopération catalytique” pourraient être susceptibles d’initier une action générale salvatrice.

Il n’est pas non plus exclu d’intervenir directement sur le climat et les écosystèmes , pour y propager, en jouant sur des points de bascule, les bons changements. Quitte à jouer avec le feu.

D’autres scientifiques militent pour une approche plus prudente, consistant à limiter les dégâts. « Il conviendrait de construire de la résilience dans le système dès maintenant, avant d’être trop près de ces points », soutient Stephen Carpenter. Les principes sont connus : favoriser la diversité et la redondance, limiter la connectivité, casser les mauvaises rétroactions et favoriser les bonnes. Malgré les risques, la fin de notre civilisation n’a rien d’inéluctable.

Si cela arrive, vaudra-t-il mieux s’isoler ou se regrouper ? Les gens pensent qu’il faut préparer un sac de survie, acheter des armes et se protéger dans un bunker, c’est complètement idiot ! Cela porte un nom : le survivalisme. L’idiotie surgit de données archéologiques, qui montrent que les sociétés qui ont réussi à se reconstituer sont celles qui ont su maintenir des liens sociaux. Pour échanger de la nourriture, se protéger, se reproduire, mais aussi bâtir et innover.

Car avouons-le : peu d’entre nous seraient capables de concevoir un grille-pain, dont d’ailleurs nous ne saurions que faire. Un individu isolé peut certes faire émerger quelques rares innovations, mais il faut au minimum des centaines de personnes, probablement des milliers, pour redémarrer une civilisation, prédit Maxime Derex, spécialiste de l’évolution culturelle à l’université d’Exeter (Royaume-Uni).

Il faut aussi pouvoir entretenir des liens sociaux pour conserver ces inventions au fil des générations : isolés par la montée des eaux à la fin du dernier âge glaciaire, les habitants de Tasmanie semblent ainsi avoir perdu l’usage d’outils de chasse essentiels. Avec pour conséquence un quasi-retour à l’âge de pierre ! Le convivialisme bien plus que le survivalisme.

Bruno Bourgeon http://www.aid97400.re
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