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Quand les roses regardent mourir les jardiniers !

Le cancer du jardinier

par Dr Bruno Bourgeon, vice-président de l’Espace Ethique de la Réunion

mardi 21 août 2018, par JMT

Un tribunal de San Francisco a condamné ce 10 août la firme Monsanto à verser près de 300 millions de dollars à un jardinier qui avait utilisé du glyphosate et qui, atteint d’un cancer, avait attaqué la firme, accusée de ne pas avoir délivré les informations adéquates sur la dangerosité de ses produits. Ce qu’un jury populaire a décidé, Monsanto le conteste : le glyphosate n’est pas cancérogène. Traduire : la preuve scientifique n’a pas été établie.

Bien des affaires de cet ordre sont en cours d’instruction. Le Centre international de recherche sur le Cancer (CIRC) a classé en 2015 le glyphosate comme cancérogène probable et perturbateur endocrinien. C’est autour du mot probable que se joue le bras de fer entre Monsanto (racheté par Bayer), les victimes supposées du glyphosate, et la partie de l’humanité soucieuse d’anticiper le retentissement des modifications de l’environnement sur la santé humaine.

Le cancer du jardinier

Un tribunal de San Francisco a condamné ce 10 août la firme Monsanto à verser près de 300 millions de dollars à un jardinier qui avait utilisé du glyphosate et qui, atteint d’un cancer, avait attaqué la firme, accusée de ne pas avoir délivré les informations adéquates sur la dangerosité de ses produits. Ce qu’un jury populaire a décidé, Monsanto le conteste : le glyphosate n’est pas cancérogène. Traduire : la preuve scientifique n’a pas été établie.

Bien des affaires de cet ordre sont en cours d’instruction. Le Centre international de recherche sur le Cancer (CIRC) a classé en 2015 le glyphosate comme cancérogène probable et perturbateur endocrinien. C’est autour du mot probable que se joue le bras de fer entre Monsanto (racheté par Bayer), les victimes supposées du glyphosate, et la partie de l’humanité soucieuse d’anticiper le retentissement des modifications de l’environnement sur la santé humaine.

Ce combat éthique se mène à trois échelons :

-  Le premier veut faire dire à la justice ce que les scientifiques ne peuvent dire. Comme dans les affaires criminelles, on fait appel à l’intime conviction au nom de l’indépendance du pouvoir judiciaire. Or la vérité du juge est fragile car plaignants et accusés usent de voies de recours qui peuvent contredire les jugements antérieurs. En France la Cour de Cassation a cassé le jugement de la Cour d’Appel de Lyon qui avait fait droit à la plainte d’un agriculteur charentais contre Monsanto. Depuis 2007, un jugement définitif est en attente. Le temps des juges est celui du temps long.

-  Le deuxième échelon tient à l’opposition entre les tenants de la réaction à la suspicion et les tenants de la preuve scientifique. La preuve c’est le nombre de morts suffisant pour établir la relation de cause à effet.

-  D’où la naissance d’un troisième échelon, celui du principe de précaution qui nage entre suspicion et preuve. La France l’a inscrit dans sa Constitution mais rien n’est réglé sur la signification de précaution. Car ce principe est de l’ordre du qualitatif et du quantitatif : il doit réunir les arguments qui indiquent qu’un produit peut nuire à la santé. Il dépasse ainsi la simple suspicion car il procède d’une démarche qui considère que la vie humaine ne peut être sacrifiée à des dangers plausibles. La science estime qu’un fait est démontré et véridique si l’on a moins de 5 % de chances de se tromper en l’affirmant comme vrai. La vérité se loge dans les probabilités ! L’Agence européenne de sécurité des aliments (Efsa) a contredit le CIRC pour écrire, en s’appuyant sur ses experts que « ni les données épidémiologiques, ni les éléments issus d’études animales n’ont démontré de causalité entre l’exposition au glyphosate et le développement de cancer chez les humains ».

Or Monsanto ne reconnaît pas le principe de précaution et s’abrite derrière ce seuil de 5 %. Attendre cette preuve, c’est bien attendre qu’il y ait suffisamment de victimes pour déclarer négligeable le risque de se tromper. Le principe de précaution est dans cette zone. Il faudrait le renforcer mais aussi le nuancer. Nuancer : son application doit tenir compte de la gravité du risque et de la robustesse de la présomption de nocivité. On ne peut tout interdire. Tel est son talon d’Achille car le choix, la décision opposent en fait la suspicion sur les risques en santé et le pouvoir de l’argent. La force de Monsanto est d’avoir su imposer au monde un mode de productivité faisant miroiter l’abondance sans se préoccuper de la nocivité. Monsanto surfe sur le désaccord entre le CIRC et celui de l’Efsa, habilement orchestré par une armée de lobbyistes forcenés.

Appelons les citoyens, agriculteurs ou citadins, à une marche progressive mais résolue vers une nouvelle relation entre l’homme et son environnement. C’est de la santé des jardiniers et des agriculteurs eux-mêmes dont il s’agit. Et plus loin de l’ensemble des consommateurs. Non seulement en France, mais en Europe, aux Etats-Unis et dans le monde. « De mémoire de rose », disait Fontenelle, « on n’a jamais vu mourir de jardinier. Dans la plénitude de leurs destins éphémères, ni les roses, ni le blé ne peuvent s’imaginer que les êtres humains ne soient pas immortels. Et pourtant ! »

Dr Bruno Bourgeon,
Vice-président de l’Espace éthique de La Réunion
Président de l’Association Initiatives Dionysiennes
http://aid97400.re

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PUBLICATION DANS LES MEDIAS LOCAUX

* Courrier des lecteurs de Zinfos974 du

* Tribune libre dans Imaz-Press Réunion publiée le 30 Août 2018

* Courrier des lecteurs dans Le Quotidien de la Réunion du

LIENS

mis à jour le 30/08/2018

* le débat du mardi du 28.08.2018 sur Réunion Première 44’31"

* Réunion Première : Journal de 19h30 du 13 août 2018.* JT de Réunion Première du 13 Août 2018 : 55000 vues, 1200 partages, 23 commentaires au 30/08/2018.

* "Le cancer du Jardinier" par Pr Roger GIL, de l’Espace Ethique d’Aquitaine

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* Pesticides : le jardinier qui fait trembler Monsanto

Franceinfo 9 août 2018

Il est l’homme qui bouscule Monsanto. Un simple jardinier californien en guerre contre le géant américain des pesticides. Installé sur les bancs du tribunal de San Francisco (États-Unis), Dewayne Johnson a le visage fermé. L’homme a 46 ans, mais en paraît beaucoup plus car il est atteint d’un cancer en phase terminale. Un cancer qu’il impute à Monsanto. Il demande plus de 350 millions d’euros Pendant deux ans, Dewayne Johnson a pulvérisé sur des terrains du Roundup et du Ranger Pro. Deux herbicides puissants fabriqués par la firme américaine, sans savoir que ces produits pouvaient être dangereux. Ils ont été classés cancérigènes probables par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2015. Selon l’avocat du jardinier, Monsanto a délibérément caché les risques. Peu de temps après les premières pulvérisations, Dewayne Johnson voit des cloques apparaître sur sa peau. Son cancer se développe et il ne peut plus travailler. En 2016, il intente un procès à la firme. Il leur demande aujourd’hui plus de 350 millions d’euros. Une condamnation qui pourrait faire jurisprudence dans le monde entier.