AID Association Initiatives Dionysiennes

Ouv zot zié !

Accueil > Politique > La guerre sert-elle l’économie ?

Traduction d’AID pour Les-crises.fr n° 2024-027

La guerre sert-elle l’économie ?

Par William D. Hartung, traduction par Jocelyne Le Boulicaut

jeudi 14 mars 2024, par JMT

AID soutient financièrement le très intéressant site "Les-crises.fr" depuis plusieurs années. Nous avons fait un pas de plus en participant aux traductions des textes anglais quand le site fait appel à la solidarité de ses adhérents. Nous avons donc mandaté une de nos adhérentes, Jocelyne LE BOULICAUT, enseignante universitaire d’anglais retraitée, pour y participer en notre nom et nous indemnisons son temps passé avec notre monnaie interne

La guerre sert-elle l’économie ?

Le 25 Février 2024 par William D. Hartung https://tomdispatch.com/war-is-bad-for-you-and-the-economy/

William D. Hartung, un collaborateur régulier de TomDispatch, est maître de recherche au Quincy Institute for Responsible Statecraft et l’auteur de Reality Check : Chinese Military Spending in Context.

Le Pentagone (photo par Thomas Hawk)

La guerre, ce n’est bon ni pour vous - ni pour l’économie. Biden vante les prétendus bienfaits de « l’Arsenal de la démocratie ». Joe Biden veut vous faire croire que dépenser de l’argent pour des armes c’est bon pour l’économie.

Ce vieux mythe éculé, régulièrement repris par les dirigeants politiques des deux partis, pourrait contribuer à créer une économie encore plus militarisée, susceptible de menacer la paix et la prospérité de notre pays pour les décennies à venir.

Tout gain à court terme lié à l’augmentation des dépenses d’armement sera plus que largement contré par les dommages à long terme causés par le manque d’intérêt pour les nouvelles industries et innovations, tout en siphonnant des fonds indispensables pour répondre à d’autres priorités nationales urgentes.

Le discours promotionnel de l’administration Biden quant aux prétendus avantages des dépenses militaires a commencé véritablement en octobre dernier, lorsque le président a prononcé dans le bureau ovale, ce qui est inhabituel, un discours visant à défendre une allocation d’urgence de 106 milliards de dollars incluant des dizaines de milliards de dollars d’armement pour l’Ukraine, Israël et Taïwan.

Les Républicains MAGA du Congrès empêchaient la mise en œuvre du financement et la Maison Blanche cherchait un nouvel argument pour les convaincre. Le président et ses conseillers ont opté pour une réponse qui aurait tout aussi bien pu sortir de la bouche de Donald Trum : l’emploi, l’emploi, l’emploi.

Comme l’a dit Joe Biden : « Nous envoyons à l’Ukraine des équipements qui se trouvent dans nos stocks. Et lorsque nous utilisons l’argent alloué par le Congrès, nous l’utilisons pour réapprovisionner nos propres stocks [...] des équipements qui servent à défendre l’Amérique et qui sont fabriqués en Amérique : des missiles Patriot pour les batteries de défense aérienne fabriqués en Arizona ; des obus d’artillerie fabriqués dans 12 États du pays - en Pennsylvanie, dans l’Ohio, au Texas - et bien d’autres choses encore ».

Au delà des retombées des technologies militaires et commerciales dans un monde changeant

Il convient de noter que deux des quatre États qu’il a cités (l’Arizona et la Pennsylvanie) sont des États clés pour sa réélection, tandis que les deux autres sont des États rouges où siègent des sénateurs Républicains dont il essaie d’obtenir qu’ils votent en faveur d’une nouvelle série d’aides militaires à l’Ukraine.

Au cas où vous penseriez que le discours économique de Joe Biden en faveur d’une telle aide n’était qu’un événement isolé, Politico a rapporté que, dans le sillage de son discours prononcé depuis le bureau ovale, des fonctionnaires de l’administration ont distribué aux membres du Congrès des éléments de langage vantant les avantages économiques d’une telle aide.

Politico a baptisé cette approche "Bombenomics". Les lobbyistes de l’administration ont même distribué une "carte" censée montrer quelle proportion de l’aide apportée à l’Ukraine reviendrait à chacun des 50 États membres.

Soit dit en passant, il s’agit là d’une tactique que des entreprises comme Lockheed Martin utilisent régulièrement pour promouvoir et maintenir le financement de systèmes d’armes coûteux et défectueux, tels que l’avion de chasse F-35. Néanmoins, on devrait s’inquiéter de voir la Maison Blanche s’abaisser à la même tactique.

Oui, il est important de fournir à l’Ukraine l’équipement et les munitions nécessaires pour se défendre contre la sinistre invasion russe, mais l’argument devrait porter sur le fond, et non se faire grâce à des récits exagérés quant à l’impact économique que cela aurait. Sinon, le complexe militaro-industriel pourra encore une fois exiger indéfiniment nos maigres ressources nationales.

Le keynésianisme militaire et les dogmes de la guerre froide

La version officielle du lien entre les dépenses militaires et l’économie est la suivante : le déploiement gigantesque de moyens pour la Seconde Guerre mondiale a permis à l’Amérique de sortir de la Grande Dépression, déclenché le développement de technologies civiles essentielles (des ordinateurs à l’internet) et créé un flux constant d’emplois manufacturiers bien rémunérés qui ont constitué l’épine dorsale de l’économie industrielle des États-Unis.

Il y a en effet une part de vérité dans chacune de ces affirmations, mais elles négligent toutes un fait essentiel : le fait de consacrer des milliers de milliards de dollars à l’armée a un coût d’opportunité qui se traduit par des investissements bien moindres dans d’autres besoins essentiels des Américains, et cela va qu’il s’agisse du logement à l’éducation, en passant par la santé publique et la protection de l’environnement.

Oui, les dépenses militaires ont effectivement aidé l’Amérique à se remettre de la Grande Dépression, mais pas parce qu’il s’agissait de dépenses militaires. C’est parce qu’il s’agissait de dépenses qu’elles ont aidé, un point c’est tout. Des dépenses du même ordre que celles consacrées à la Seconde Guerre mondiale auraient relancé l’économie.

Si, à l’époque, ces dépenses militaires étaient sans aucun doute une nécessité, aujourd’hui, elles relèvent davantage de la politique et des priorités (des entreprises) que de l’économie.

Ces dernières années, les dépenses du Pentagone ont grimpé en flèche et le budget de la défense continue de se rapprocher de la barre des mille milliards de dollars par an, tandis que les espérances de dizaines de millions d’Américains se sont effritées.

Aux USA 140 millions de personnes sont pauvres ou à faibles revenus

Plus de 140 millions d’entre nous appartiennent aujourd’hui à la catégorie des pauvres ou des personnes à faible revenu, dont un enfant sur six . Plus de 44 millions d’entre nous souffrent de la faim tous les ans.

On estime que 183000 Américains sont morts de causes liées à la pauvreté en 2019, soit plus que les homicides, la violence armée, le diabète ou l’obésité.

Pendant ce temps, de plus en plus d’Américains vivent dans la rue ou dans des refuges, le nombre de sans-abri atteignant le chiffre record de 650000 en 2022.

Le plus choquant est peut-être que les États-Unis ont aujourd’hui l’espérance de vie la plus faible de tous les pays industrialisés, alors même que l’Institut international d’études stratégiques rapporte que leur budget militaire représente aujourd’hui 40% de celui du monde - oui, du monde entier ! C’est quatre fois plus que son plus grand rival, la Chine.

En fait, c’est plus que les 15 pays qui suivent combinés, dont beaucoup sont des alliés des États-Unis. Il est grand temps de s’interroger sur les types d’investissements qui garantissent réellement la sécurité des Américains et leur sécurité économique : un budget militaire pléthorique ou des investissements destinés à répondre aux besoins fondamentaux de la population.

Que faudra-t-il pour que Washington investisse pour répondre aux besoins non militaires à hauteur de ce que l’on accorde régulièrement au Pentagone ? Pour cela, nous aurions besoin d’un leadership présidentiel et d’un nouveau Congrès plus tourné vers l’avenir. C’est un objectif à long terme ambitieux, mais qui vaut la peine d’être concrétisé.

Si une réorientation des priorités budgétaires était mise en œuvre à Washington, les dépenses qui en résulteraient pourraient, par exemple, créer entre 9% d’emplois supplémentaires pour la production d’énergie éolienne et solaire et trois fois plus d’emplois dans le domaine de l’éducation.

Quant aux retombées tant vantées de la recherche militaire, investir directement dans des activités civiles plutôt que de compter sur les retombées des dépenses du Pentagone produirait beaucoup plus rapidement des technologies beaucoup plus utiles.

Cessez-le-feu maintenant (Photo par Nathaniel St. Clair)

En fait, au cours des dernières décennies, le secteur civil de l’économie s’est montré beaucoup plus dynamique et innovant que les initiatives financées par le Pentagone, ce qui explique, n’en soyez pas surpris, que les retombées militaires ont fortement diminué.

En revanche, le Pentagone cherche désespérément à attirer dans son orbite les entreprises et les talents de haute technologie, un pari qui, s’il réussit, risque de saper la capacité de la nation à créer des produits utiles qui pourraient faire progresser le secteur civil.

Les entreprises et les travailleurs qui pourraient être impliqués dans le développement de vaccins, la production de technologies respectueuses de l’environnement ou la recherche de nouvelles sources d’énergie verte seront au contraire mis à contribution pour construire une nouvelle génération d’armes mortelles.

Des rendements décroissants

Ces dernières années, le budget du Pentagone a atteint son niveau le plus élevé depuis la Seconde Guerre mondiale : 886 milliards de dollars .

Cela représente des centaines de milliards de dollars de plus que ce qui a été dépensé pendant l’année la plus intense de la guerre du Viêt Nam ou au plus fort de la guerre froide.

Néanmoins, le nombre réel d’emplois dans le secteur de la fabrication d’armes a chuté de façon spectaculaire, passant de trois millions au milieu des années 1980 à 1,1 million aujourd’hui.

Bien sûr, un million d’emplois, ce n’est pas rien, mais la tendance à la baisse de l’emploi dans le secteur de l’armement devrait se poursuivre à mesure que l’automatisation et l’externalisation se développent.

Le processus de réduction des emplois dans l’industrie de l’armement sera accéléré par une plus grande dépendance vis-à-vis des logiciels par rapport à la technologie dans la conception de nouveaux systèmes d’armes qui intègrent l’intelligence artificielle.

L’accent étant mis sur les technologies émergentes, les emplois sur les chaînes de montage diminueront, tandis que le nombre de scientifiques et d’ingénieurs impliqués dans les travaux liés à l’armement ne fera qu’augmenter.

En outre, comme l’a souligné le journaliste Taylor Barnes, les emplois de l’industrie de l’armement qui subsistent sont susceptibles d’être nettement moins bien rémunérés que par le passé, étant donné que les taux de syndicalisation dans les principales entreprises continuent de chuter vertigineusement, tandis que les contrats syndicaux à deux niveaux privent les nouveaux travailleurs du type de rémunération et d’avantages dont jouissaient leurs prédécesseurs.

Pour citer deux exemples : en 1971, 69 % des travailleurs de Lockheed Martin étaient syndiqués, contre 19 % en 2022 ; chez Northrop Grumman, seuls 4 % des employés sont syndiqués aujourd’hui. L’idée même que la production d’armes offrirait des emplois manufacturiers bien rémunérés et assortis de bons avantages sociaux est en train de devenir rapidement quelque chose qui appartient au passé.

Des emplois plus nombreux et mieux rémunérés pourraient être créés en consacrant davantage de dépenses aux besoins nationaux, mais cela nécessiterait un changement radical des politiques et de la composition du Congrès.

L’armée n’est pas un « programme de lutte contre la pauvreté »

Les membres du Congrès et l’élite de Washington continuent d’affirmer que l’armée américaine est le programme de lutte contre la pauvreté le plus efficace du pays. Si la solde, les avantages, la formation et le financement de l’éducation dont bénéficient les membres de l’armée ont certainement aidé certains d’entre eux à améliorer leur sort, ce n’est pas tout à fait le cas.

En effet, les éventuels désavantages inhérents à la fonction militaire relativisent considérablement tout avantage financier. Après tout, de nombreux vétérans des guerres désastreuses menées par les États-Unis après le 11 septembre ont risqué leur santé physique et mentale, sans parler de leur vie, pendant leurs années d’engagement dans l’armée.

En effet, 40% des vétérans des guerres d’Irak et d’Afghanistan ont fait état de handicaps liés à leur carrière. Les problèmes de santé physique et mentale dont souffrent les anciens combattants vont de la perte d’un membre au syndrome de stress post-traumatique (SSPT), en passant par des lésions cérébrales traumatiques .

Ils sont également plus exposés au risque de devenir sans-abri que l’ensemble de la population. Plus tragique encore, on dénombre quatre fois plus de suicides chez les vétérans que de militaires tués par les forces ennemies dans toutes les guerres menées par les États-Unis au cours de ce siècle.

Le bilan de ces conflits désastreux pour les anciens combattants est l’une des nombreuses raisons pour lesquelles la guerre devrait être l’exception, et non la règle, dans la politique étrangère des États-Unis.

Dans ce contexte, il ne fait aucun doute que la meilleure façon de lutter contre la pauvreté est de le faire directement, et non en tant que conséquence secondaire du renforcement d’une société de plus en plus militarisée.

Si les gens ont besoin d’une éducation et d’une formation pour avancer dans la vie, elles doivent être offertes aux civils comme aux anciens combattants.

Le USS Gerald R. Ford (CVN 78) est le navire de guerre le plus avancé technologiquement jamais construit (Ricky Thompson for Huntington Ingalls Industries)

Arbitrages

Les efforts déployés par le gouvernement fédéral pour résoudre les problèmes décrits ci-dessus ont été entravés par une combinaison de deux éléments, d’une part des dépenses excessives du Pentagone et, d’autre part, la réticence du Congrès à taxer plus lourdement les riches Américains pour lutter contre la pauvreté et les inégalités.

(En effet, les 1% les plus riches détiennent aujourd’hui une valeur cumulée supérieure à celle des 291 millions qui font partie des 90% les plus pauvres, ce qui représente, depuis ce dernier demi-siècle écoulé une nouvelle répartition des richesses complètement différente. Les contreparties sont très lourdes.

Le budget annuel du Pentagone représente plus de 20 fois les 37 milliards de dollars que le gouvernement investit désormais chaque année dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le cadre de la loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act).

Par ailleurs, les dépenses consacrées à la production d’armes et à la recherche sont à elles seules plus de huit fois supérieures. Pour un seul avion de combat - le F-35, trop cher et peu performant - le Pentagone dépense chaque année plus que le budget total des centres de contrôle et de prévention des maladies.

Par ailleurs, la production d’un porte-avions d’une valeur de 13 milliards de dollars dépasse le budget annuel de l’Agence pour la protection de l’environnement.

De même, en 2020, Lockheed Martin a reçu à lui seul 75 milliards de dollars de contrats fédéraux, soit plus que les budgets du Département d’État et de l’Agence pour le développement international réunis.

En d’autres termes, la somme totale des contrats annuels de cette entreprise équivaut à l’ensemble du budget américain consacré à la diplomatie. Le simple transfert de fonds du Pentagone vers des programmes nationaux ne constituerait évidemment pas une solution magique à tous les problèmes économiques de l’Amérique.

Il va de soi que le simple fait de procéder à une telle réorientation constituerait une entreprise politique majeure et que les fonds ainsi réorientés devraient être dépensés de manière efficace. En outre, même une réduction de moitié du budget du Pentagone ne suffirait pas à prendre en compte tous les besoins non satisfaits de ce pays.

Cela nécessiterait un ensemble complet de mesures, comprenant non seulement un changement des priorités budgétaires, mais aussi une augmentation des recettes fédérales et une réduction du gaspillage, de la corruption et des abus dans l’octroi des prêts et des subventions de l’État. Cela exigerait également une attention et une mobilisation comparables à celles qui sont aujourd’hui réservées au financement de l’armée.

Le budget éthique de la campagne des pauvres (Poor People’s Campaign), un mouvement national composé de personnes à faibles revenus inspiré par l’initiative du même nom lancée en 1968 par le révérend Martin Luther King, Jr. avant son assassinat le 4 avril, propose un plan global pour réformer l’économie afin qu’elle serve au mieux les intérêts de tous les Américains.

Ses priorités sont la promotion de la justice raciale, l’éradication de la pauvreté, l’opposition au militarisme et le soutien à la restauration de l’environnement.

Son budget éthique propose d’investir plus de 1 200 milliards de dollars dans les besoins nationaux, grâce à la réduction des dépenses du Pentagone et à l’augmentation des recettes fiscales provenant des particuliers et des entreprises les plus riches.

Une telle réorientation des priorités américaines est sans aucun doute une entreprise de longue haleine, mais elle offre vraiment une meilleure approche que de continuer à négliger les besoins fondamentaux pour alimenter la machine de guerre.

Si la tendance actuelle se poursuit, l’économie militaire ne fera que croître au détriment de tellement d’autres choses dont nous avons besoin en tant que société, exacerbant les inégalités, étouffant l’innovation et perpétuant une politique de guerre sans fin.

Nous ne pouvons pas permettre que l’illusion - et c’est une illusion ! - d’une prospérité alimentée par l’armée nous autorise à négliger les besoins de dizaines de millions de gens ou à entraver notre capacité à imaginer le monde que nous voulons construire pour les générations futures.

La prochaine fois que vous entendrez un politicien, un bureaucrate du Pentagone ou un représentant d’entreprise vous parler des merveilles économiques que représentent les budgets militaires colossaux, ne croyez pas à ce battage médiatique.

Copyright 2024 William D. Hartung

Suivez Tom Dispatch sur Twitter et rejoignez-nous sur Facebook. Découvrez les nouveaux livres de Dispatch, le nouveau roman dystopique de John Feffer Songlands (Terres de chants) (le dernier de sa série Splinterlands), le roman de Beverly Gologorsky Everybody Has a Story (Tout le monde a une histoire), et de Tom Engelhardt A Nation Unmade by War (Une nation défaite par la guerre), ainsi que d’Alfred McCoy, In the Shadows of the American Century : The Rise and Decline of U.S. Global Power (Dans l’ombre du siècle américain : L’ascension et le déclin du pouvoir planétaire américain) ; de John Dower, The Violent American Century : War and Terror Since World War II (Le siècle violent américain : guerre et terreur depuis la seconde guerre mondiale), et d’Ann Jones, They Were Soldiers : How the Wounded Return from America’s Wars : The Untold Story. (Ils étaient soldats : comment les blessés sont revenus des guerres américaines : l’histoire non racontée). [aucun de ces livres n’est traduit en français, NdT]

Version imprimable :